PAR Fazil Azmar
D’après l’expert en économie, Abderrahmane Mebtoul, aucun gouvernement algérien, depuis l’indépendance politique, et en dépit des discours et des mesures administratives, n’a pu éradiquer la sphère informelle. Rappelons à ce propos, que ce n’est que dernièrement qu’une estimation plus ou moins précise a été donnée sur le volume du flux qui circule dans la sphère informelle, à savoir 90 milliards de dollars. Mebtoul fait référence à cela, rappelant que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a signalé, lors de sa conférence devant le Conseil économique et social le 28 septembre, que 10 000 milliards de dinars circulent hors banques, reconnaissant la difficulté d’avoir le chiffre réel. «La sphère informelle en Algérie est favorisée par l’instabilité juridique, monétaire et par le manque de visibilité de la politique socio-économique. En outre, plus de 40% de la population active dans l’informel tout en contrôlant des pans entiers de l’économie nationale, des biens de consommation notamment», fait-il savoir. Cette sphère, par ailleurs, poursuit-il, utilise des billets de banque au lieu de la monnaie scripturale (chèque) ou électronique, faute de confiance. «Il existe des situations soit de monopole ou d’oligopoles au niveau de cette sphère. Les entrepreneurs, qu’ils soient nationaux ou étrangers, demandent seulement à voir clair. Ceux, du moins, qui misent sur le moyen et le long termes, sur les investissements inducteurs de valeur ajoutée en somme, contrairement aux partisans de solutions de facilité», dit-il, rapportant que la dominance de la sphère informelle, dont l’essence renvoie au mode de gouvernance et à l’incohérence de la politique socio-économique, prouve que des mesures bureaucratiques comme solutions ont eu peu d’effets. Pour l’expert en économie, Toufik Hentabli, il sera plus facile de mettre en place les mécanismes de lutte contre ce fléau maintenant que les estimations de l’ampleur de l’argent informel sont visibles. «Ainsi, tous les acteurs concernés pourront apporter les solutions qu’il faut et réagir fermement. Certains spécialistes de la question, en fait, ont proposé une amnistie fiscale afin d’inciter les acteurs informels à intégrer le réseau formel. Personnellement, je suis d’accord à condition que cela ne concerne pas l’argent qui provient de blanchiment ou de corruption», souligne-t-il. D’autres, révèle-t-il, ont proposé aux acteurs de l’informel d’acheter des parts dans des entreprises publiques ou bien de normaliser l’argent informel par l’acquisition de biens. «Cette idée ne m’agrée pas et ce, pour deux raisons. Tout d’abord, le climat actuel des affaires ne s’y prête pas puisque les discours politiques prennent toujours le pas sur les actions concrètes et, ensuite, cette proposition sera difficile à appliquer vu que le programme économique national n’est pas doté d’un délai fixé dans le temps et dont les actions sont vagues et imprécises», explique-t-il. Le plus judicieux, selon lui, est la mise en place d’un système de contrôle national performant, numérisé assurant de la transparence et de la traçabilité en reliant toutes les structures concernées, finances, banques, impôts, douanes, domaines, aux organismes de sécurité tout en instruisant les notaires et les fournisseurs à faire leur déclarations dans cette plateforme. Néanmoins, comme solution radicale, il propose un changement de monnaie nationale, en enlevant les deux zéros au lieu de 01. n