Par Nadir Kad
Les informations faisant état de plusieurs centaines de morts et les terribles images des destructions causées par le séisme en Syrie et en Turquie, ont ravivé hier de douloureux souvenirs en Algérie. Le pays, et particulièrement le nord, est situé sur une zone connue pour le risque sismique, l’histoire récente retient en ce sens les dramatiques séismes de 1980 à Chlef, de 1989 à Tipasa, de 1999 à Aïn Témouchent ou encore celui de 2003 à Boumerdès. Ainsi, au-delà de l’émotion, la question qui se pose reste une nouvelle fois la capacité à répondre aux risques majeurs, mais aussi l’anticipation et la mise en œuvre effective des évolutions de la réglementation en matière de construction parasismique.
Une stratégie dictée par la géographie du pays entouré par au moins cinq failles, dont la faille du Sahel, de la Mitidja et du Chenoua… Le CRAAG (Centre de recherche en astronomie, astrophysique et géophysique), qui centralise les données de près de 80 stations fonctionnant selon les normes internationales en matière de surveillance des séismes, enregistre près d’une centaine de séismes par mois, mais principalement de faible intensité, de magnitude inférieure à 3 degrés sur l’échelle de Richter, et le plus souvent imperceptibles pas la population. Toutefois, et bien que les autorités soient largement au fait de la situation, en durcissant régulièrement la législation sur l’urbanisme et la construction parasismique, un rapide retour sur les déclarations des experts au cours de dernières années laissent cependant apparaître la persistance de certaines lacunes, principalement en matière d’application de la réglementation sur le terrain.
En ce sens, l’une des personnalités les plus citées dans ce domaine, le Professeur Abdelkrim Chelghoum, président du «club algérien des risques majeurs» et directeur de recherche en génie parasismique et numérique à l’USTHB, avait appelé en 2021 à ne pas se contenter de «gérer la catastrophe», mais plutôt d’apprendre à «gérer les risques». Le scientifique, qui salue les énormes progrès enregistrés par la protection civile, «un organe très organisée qui a des moyens lui permettant d’être vigilant et prêt en cas de catastrophe», ou encore le Génie Militaire régulièrement engagé lors de l’activation des plans ORSEC (organisation des secours), avait également rappelé que le «club algérien des risques majeurs» demande, concernant le risque sismique, l’organisation périodique de l’évaluation des infrastructures telles que des ponts, routes, réseaux de communications, d’alimentation en électricité, gaz…
«Ce sont des ouvrages à caractères stratégique qui doivent rester début quel que soit l’intensité de la catastrophe (…) c’est pour cela que nous avons demandé une expertise rapide et l’installation d’instruments de mesure».
Pour rappel, l’une des principales évolutions de la législation relative à la prévention des risques majeurs et à la gestion des catastrophes avait été adoptée en 2004, suite à la terrible catastrophe de 2003 à Boumerdès et les régions voisines. L’avancée du texte, qui modifiait la loi de 1990, avait notamment été la redéfinition des règles lors de l’élaboration des plans d’aménagement et d’urbanisme. Par ailleurs, le texte avait aussi pris en compte les prescriptions des plans généraux de prévention des risques majeurs et l’identification des zones sismiques classées selon leur degré de vulnérabilité. Par ailleurs, il est également à noter que le président du «club algérien des risques majeurs» avait également appelé à la prise de mesures particulières pour les habitations les plus anciennes, et notamment pour les «1,2 million de bâtiments» datant de l’ère coloniale.