Le chef de la Commission de l’Union africaine (UA), le Tchadien Moussa Faki Mahamat, a dénoncé «le traitement violent et dégradant de migrants africains» vendredi lors d’une tentative d’entrée massive dans l’enclave espagnole de Melilla et réclamé une enquête sur ce drame.

«J’exprime ma profonde émotion et mon inquiétude face au traitement violent et dégradant de migrants africains cherchant à traverser une frontière internationale entre le Maroc et l’Espagne», a tweeté dimanche soir Moussa Faki. «J’appelle à une enquête immédiate sur cette affaire et rappelle à tous les pays leurs obligations, aux termes de la loi internationale, à traiter tous les migrants avec dignité et à faire porter leur priorité sur leur sécurité et leurs droits humains, tout en réfrénant tout usage excessif de la force», a ajouté le chef de la commission de l’UA. Au moins 23 migrants ont péri et 140 policiers ont été blessés, selon les autorités marocaines, lors d’une tentative d’entrée de quelque 2.000 migrants dans l’enclave espagnole de Melilla, en territoire marocain. Ce bilan est le plus meurtrier jamais enregistré lors des nombreuses tentatives de migrants subsahariens de pénétrer à Melilla et dans l’enclave espagnole voisine de Ceuta, les seules frontières terrestres de l’Union européenne avec le continent africain. Pour rappel, plusieurs appels ont été lancés samedi en Espagne et ailleurs, pour réclamer une enquête indépendante sur cette «tragédie». «Nous appelons à l’ouverture d’une enquête rapide et transparente», a déclaré aux médias, Mohamed Amine Abidar, le président de la section de l’Association marocaine des droits de l’Homme (AMDH) à Nador, dans le nord du Maroc. Pour sa part, l’ONG espagnole Caminando Fronteras, spécialiste des migrations entre l’Afrique et l’Espagne, a exigé samedi dans un communiqué «l’ouverture immédiate d’une enquête judiciaire indépendante du côté marocain comme espagnol, ainsi qu’au niveau international pour faire toute la lumière sur ce drame humain». De son côté, Eduardo de Castro, le président (maire) de Melilla et plus haute autorité politique de cette ville autonome, a dénoncé une «réponse disproportionnée» du Maroc à la tentative de passage des migrants. «Le Maroc se permet certaines choses qui ne seraient pas acceptables» en Espagne, a-t-il dit.

90 migrants secourus depuis vendredi par l’Ocean Viking

Par ailleurs, l’Ocean Viking, le navire humanitaire de SOS Méditerranée, a secouru dimanche 75 migrants se trouvant sur «une embarcation pneumatique surchargée et en détresse» au large de la Libye, portant à 90 le nombre de rescapés à bord, a indiqué l’ONG dans un communiqué. Parmi les personnes secourues dimanche, dont «aucune n’avait de gilet de sauvetage», se trouvent 34 mineurs non accompagnés, quatre femmes enceintes, huit enfants et un bébé de 9 mois», a précisé l’ONG, dont le siège est à Marseille dans le sud de la France. Vendredi, l’Ocean Viking avait déjà porté secours à 15 personnes «qui étaient sur une embarcation en fibre de verre en détresse dans les eaux internationales au large de la Libye», a rappelé SOS Méditerranée, ajoutant que là encore «aucun naufragé ne portait de gilet de sauvetage». Cela porte donc à 90 le nombre de rescapés présents à bord du navire humanitaire affrété par l’ONG en partenariat avec la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR). En mai, lors de sa dernière mission en Méditerranée centrale, la route migratoire la plus dangereuse du monde, l’Ocean Viking avait porté secours à quelque 300 personnes, dont un bébé de trois mois et six femmes enceintes, mais avait dû attendre une dizaine de jours avant de se voir désigner un port sûr, en Sicile, pour débarquer ces rescapés. Chaque année, des milliers de personnes fuyant conflits ou pauvreté tentent de rejoindre l’Europe en traversant la Méditerranée depuis la Libye, dont les côtes sont distantes de quelque 300 kilomètres de l’Italie. Quelque 17.000 personnes ont traversé la Méditerranée centrale depuis le début de l’année, selon le ministère italien de l’Intérieur. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), au moins 1.553 personnes y ont perdu la vie ou y ont disparu en 2021. Depuis février 2016, quelque 36.000 femmes, hommes et enfants ont été secourus par SOS Méditerranée avec les navires Aquarius puis Ocean Viking. (Source AFP)