Alors que se rapprochait la fin de sa période de mise sous mandat de dépôt, prévue le 10 février, Abdelouahab Fersaoui restera encore en prison en attendant la date de son procès. C’est ce qu’a annoncé, hier, l’association Rassemblement Action Jeunesse (RAJ), dont il est le président, confirmé par la suite par le Comité national pour la libération des détenus (CNLD). « Le juge d’instruction vient de notifier la prolongation du mandat de dépôt au camarade et ami Fersaoui Abdelouhab président de l’association RAJ dans l’attente de la programmation de son procès que nous espérons le plus vite possible », a écrit l’association, citant l’avocate Me Siham Hammache, réitérant au passage la revendication de sa libération. Ce rebondissement dans l’affaire du président de RAJ intervient pourtant au moment où le sentiment d’apaisement plane sur la question des détenus d’opinion. En effet, la vague de libérations et d’acquittements des prisonniers d’opinion se poursuit depuis début janvier avec la libération de Lakhdar Bouregaâ et 76 jeunes porteurs de l’emblème amazigh. Plusieurs militants de RAJ ont été alors relâchés, d’autres ont bénéficié de liberté provisoire, en attendant leur procès en appel le 4 mars, alors qu’avant-hier, on a assisté tout simplement à l’acquittement de l’activiste Samir Belarbi. C’est à se demander pourquoi certains dossiers de détenus traînent au niveau de la justice, d’autant qu’il y a une volonté clairement affichée du Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, de régler cette affaire portée à bras le corps par le Hirak, qui se maintient malgré tout les vendredis et mardis ? Les photos et posters des figures telles que Karim Tabbou, Abdelouahab Fersaoui ou encore Fodil Boumala sont brandis partout par ceux qui battent le pavé. Pour tous les observateurs, le dialogue ne peut réussir que dans un climat apaisé, ce qui passe par la libération de ces détenus qui ont payé de leur liberté leur implication dans le Hirak et leur opposition farouche au régime, n’ont cessé de dénoncer les avocats.
Dans le dossier de Fersaoui, une demande de liberté provisoire a été rejetée récemment. Arrêté le 10 octobre dernier par des agents en civil, alors qu’il participait à un rassemblement de soutien aux détenus d’opinion organisé devant le tribunal de Sidi M’hamed, il est poursuivi pour les chefs d’inculpation d’«atteinte à l’intégrité du territoire national » et d’« incitation à la violence », en vertu des articles 74 et 79 du code pénal. Un autre détenu a subi presque le même sort. Il s’agit de Karim Tabbou, pour lequel le Procureur a fait appel de la décision du juge d’instruction de la 10e chambre du tribunal de Sidi M’hamed qui a transmis son dossier en correctionnel pour la programmation de son procès. Désormais, la chambre d’accusation de la Cour d’Alger statuera sur l’appel du Procureur, le 12 février prochain. L’autre procès programmé le 9 du mois en cours au tribunal de Dar El Beïda est celui de Fodil Boumala. Placé en détention préventive à la prison d’El Harrach, le 19 septembre dernier, l’activiste est poursuivi pour les chefs d’inculpation d’«atteinte à l’intégrité du territoire national» et d’«atteinte à l’unité nationale».
Alors que le Hirak s’apprête à commémorer dans quelques jours son premier anniversaire, ces détenus auront-ils la chance de retrouver la liberté ? La vague des libérations se poursuivra-t-elle pour ouvrir la voie à une nouvelle ère entre le pouvoir et le Hirak ? Les questions restent posées.