Par Khaled Remouche
Le premier responsable du secteur de l’industrie pharmaceutique a annoncé la mise en service, en 2023, par des laboratoires privés algériens de deux usines, l’une à Alger, l’autre à Oran, qui permettront de couvrir 30 à 35% des besoins en médicaments anticancéreux.
L’heure est à la relance de l’industrie pharmaceutique qui connaîtra vraisemblablement un essor au courant des années 2023 et 2024, mais, également, à l’assainissement du marché du médicament. Ali Aoun, le ministre chargé de l’Industrie pharmaceutique, dans un entretien diffusé vendredi dernier par l’ENTV, chaîne de télévision publique, a en effet relevé les écarts dans la production locale des médicaments que son département compte corriger ainsi que les pratiques frauduleuses à l’importation des médicaments.
Il a abordé ainsi le phénomène du commerce dit du cabas, c’est-à-dire l’importation frauduleuse de médicaments indisponibles sur le marché. Certains citoyens sont obligés d’y recourir face à la persistance des tensions sur certains médicaments.
Le premier responsable du secteur a alerté les citoyens en indiquant que ces médicaments introduits frauduleusement en Algérie par la voie du cabas sont des médicaments contrefaits qui nuisent à la santé de la population. «Ce sont de véritables poisons», a-t-il soutenu. Avec le concours des services de sécurité, le gouvernement tente de mettre fin à ce trafic. Ce business du cabas représente un marché de 500 millions d’euros. Quel est le mode d’emploi de ces fraudeurs ? Ces médicaments sont introduits en Algérie par la voie terrestre, c’est-à-dire par la frontière tunisienne. Les tenants de ce business ne sont pas des professionnels du secteur. Ils acquièrent ces produits pharmaceutiques proches de leur date de péremption auprès de laboratoires implantés notamment en France et en Italie, a-t-il ajouté. Ces opérateurs changent les vignettes avant de commercialiser ces produits en Algérie à des prix plus chers.
Ali Aoun a affirmé que le problème de pénurie de médicaments sera réglé rapidement, c’est-à-dire dans les prochaines semaines, voire les prochains jours. En ce sens, une disposition de la loi de finances 2023 prévoit des sanctions à hauteur d’1 million de dinars et 10% du chiffre d’affaires sur le produit pharmaceutique si les importateurs ne respectent pas leurs programmes d’importation. Quant aux compléments alimentaires dont le dossier n’est pas pris en charge directement par son département, il a indiqué qu’il y a eu une coordination avec le ministère du Commerce qui a abouti à l’interdiction à la vente de ces produits ainsi qu’à leur publicité.
Le processus en cours actuellement est similaire au circuit du médicament, à savoir l’agrément de l’opérateur et du distributeur assujetti à une analyse de la composition du produit et de ses vertus thérapeutiques avant la commercialisation du produit conditionné, en un mot, à sa qualité. Des acteurs de cette filière ont fait passer ces compléments alimentaires comme ayant les vertus des médicaments. Le ministre de l’Industrie pharmaceutique a fait allusion aux compléments alimentaires au zinc qui pour certains sont composés, selon lui, de ce métal lourd qui est dangereux pour la santé.

Commerce du cabas : un marché de 500 millions d’euros
Quant à la production locale de médicaments, il a pointé du doigt le phénomène de production alibi du médicament qui persiste en Algérie. Il a cité une multinationale qui ne produit que quelques médicaments de sa marque en Algérie au profit de l’importation en quantités de ses spécialités qui représentent une grande partie de son chiffre d’affaires en Algérie. «Nous suivons cette multinationale et nous attendons qu’elle respecte ses engagements de production». Il a ajouté que son ministère a déjà fermé une usine d’un laboratoire privé local pour n’avoir pas respecté les normes internationales de qualité en vigueur en Algérie. «Dans le cas contraire, nous serons obligés d’intervenir». Il faut savoir que les multinationales étrangères dominent le marché algérien du médicament. Ali Aoun a souligné qu’il effectue un suivi quotidien des opérations d’investissement en vue de lever les entraves bureaucratiques à l’investissement dans le secteur et des programmes d’importation en vue de prévenir les pénuries de médicaments. Concernant le producteur public du médicament, Saidal, le ministre a rappelé que cette entreprise va être renforcée. «Elle ne couvre que 2% du marché actuellement», a-t-il indiqué Ce fleuron de l’industrie pharmaceutique produisait 350 médicaments, il n’en produit que 50. Il a affirmé qu’en 2012, on a favorisé la chute de Saidal avec la fermeture de son usine d’insuline à Constantine et la transformation du complexe d’antibiotiques de Médéa en usines dédiées à l’importation de matières premières et non à la production de ces matières premières. Quant aux vaccins, Saidal, en partenariat avec l’Institut Pasteur, commencera à produire les vaccins en Algérie. Il a enfin laissé entendre que la production locale du médicament ne couvre qu’environ 50% des besoins et non 70% comme annoncé auparavant. Le ministre a ajouté que deux usines, l’une à Oran et l’autre à Alger, entreront en production en 2023 et permettront de couvrir 30 à 35% des besoins en médicaments anticancéreux. n