Par Daho Djerbal

Un des acteurs principaux de la lutte armée du FLN en France durant la période 1954-1962, Moussa Kebaïli vient de décéder. Il sera enterré ce jour, le 26 mars 2023, parmi ses compagnons d’armes à El Alia.

Moussa Kebaïli est né à Salah Bey (ex-Pascal), sous-préfecture d’Ain Oulmene, à environ 20 km de Sétif, et à 7km de Ksar al Abtal (camp militaire tristement célèbre connu alors sous le nom de Ksar-et-tir). Il était issu d’une famille relativement aisée et lettrée en arabe dans laquelle le mouvement nationaliste et la lutte armée de libération y ont puisé leur part de vies et de sacrifices.

M. Amara, l’instituteur de l’école indigène où il faisait ses premières classes a été pour beaucoup dans son passage à la conscience nationale. L’expression « ou tu travailles, ou tu crèves » que son maître lui adressait assénait sonnait comme un sévère avertissement et une sorte de ligne de conduite pour sortir de la subalternité à laquelle tous les Algériens de son âge, instruits ou non, étaient voués. Au lycée, dans ce fameux réservoir de chefs nationalistes des années 1940-1950, il ne pouvait pas ne pas connaître ou rencontrer ses aînés. Ni Kateb Yacine, ni Abdelhamid Benzine, ni Belaïd Abdesslam, ni les Maïza ne lui étaient inconnus. Avec ces prédécesseurs, le PPA-MTLD y avait installé premières ses cellules clandestines.

Mis à l’index comme agitateur, il quitte Sétif pour Constantine et enfin Skikda (Philippeville).

Comme il devient impossible pour lui de poursuivre ses études secondaires en Algérie, il part pour la France et débarque à Montpellier avant de rejoindre le lycée de Saint Maur (Val de Marne).

C’est là que novembre 1954 le surprend.

En 1955, il renonce à ses études supérieures et commence la première expérience de vie clandestine. Il rencontre Mourad Terbouche et Ahmed Doum, les responsables des premières cellules du FLN en France dans lesquelles il est affecté. 1956-1957, il grimpe dans la hiérarchie de l’organisation et participe au recrutement des étudiants. En 1958, en sa qualité de chef de la wilaya de Paris et Région parisienne, il participe à Cologne à la réunion du comité fédéral de la Fédération de France du FLN qui décide de l’offensive d’août annonçant l’ouverture du second front en territoire métropolitain. Le 5 juillet 1958, depuis l’installation du Comité fédéral de la fédération de France du FLN en Allemagne, Moussa Kebaïli est à la fois responsable de la wilaya de Paris et coordinateur de l’organisation du FLN en France.

Arrêté en décembre, il subit les affres de la torture que relate La Gangrène, un recueil de témoignages d’Algériens torturés en région parisienne ; ce livre sera saisi par la police et interdit de diffusion par la censure. À la prison de Fresnes, il devient responsable du comité de détention et a le privilège de rencontrer les illustres détenus dont Mohamed Boudiaf, Rabah Bitat et Mostefa Lacheraf.

Par son parcours militant, nous retrouvons les lignes de force, les moments de rupture et les sacrifices qui ont forgé la génération de la lutte de libération du peuple algérien en la faisant entrer dans l’histoire du XXe siècle comme un moment décisif de la libération des peuples coloniaux.

Daho Djerbal

 26 Mars 2023