Faut-il vacciner les enfants et adolescents âgés entre 12 et 17-18 ans ? Telle est la question actuellement posée sur la table du Comité scientifique de suivi de l’évolution de la pandémie de coronavirus, selon l’un de ses membres, en cette période critique de la pandémie de Covid-19 dont le variant Delta a pris le dessus en touchant même les enfants.

PAR INES DALI
Bon nombre parmi eux ont même été admis en hospitalisation dans certaines wilayas du pays, notamment les plus touchées par la pandémie, alors que «l’hospitalisation des enfants pour Covid-19 est normalement exceptionnelle», selon les spécialistes.
Une réflexion est engagée actuellement au sein du Comité scientifique qui débat de ce sujet pour sortir avec une solution dans un délai acceptable, surtout que les mineurs compris dans la tranche d’âge susmentionnés sont tous scolarisés, d’où le risque d’une propagation rapide du variant Delta au sein des établissements scolaire est à craindre si des mesures pour assurer leur protection ne sont pas prises à temps.
En effet, à moins d’un mois de la rentrée scolaire prévue le 7 septembre prochain et la rentrée sociale qui interviendra quelques jours avant, la question de la vaccination des plus jeunes parmi la population se pose avec acuité en cette période de troisième vague virulente, l’objectif final étant d’assurer une rentrée dans la sérénité d’un point de vue sécurité sanitaire, pour tous les Algériens.
«Il y a actuellement des discussions au sein du Comité scientifique de suivi de la pandémie pour préparer quelque chose sur la vaccination de enfants qui est devenue incontournable si on veut arriver à une immunité collective», a déclaré le Pr Fawzi Derrar, membre du Comité scientifique. Il a étayé son propos par le fait que «les enfants jouent un grand rôle dans la propagation du coronavirus».
Dans ce cadre, le Pr Derrar a indiqué que cela s’est vu dans les expériences menées aux Etats-Unis. «Dernièrement, il y a eu un article aux Etats-Unis indiquant que les enfants peuvent jouer un grand rôle dans la propagation du virus, mais aussi pour atteindre l’immunité collective. Ce qui veut dire que leur vaccination est incontournable si on veut arriver à une immunité solide de la population», a indiqué le Pr Derrar, qui est également directeur général de l’Institut Pasteur d’Algérie (IPA).
Il a poursuivi en soulignant que la réflexion sur cette question engagée au sein du Comité scientifique tient compte de plusieurs paramètres. Il a cité parmi ces paramètres «les essais cliniques effectués par les producteurs de vaccins sur les enfants», relevant qu’initialement certains vaccins étaient admis à partir de 18 ans, mais que maintenant il commence à y avoir des vaccins qui ont été testés sur les enfants, dont l’antidote chinois Sinovac. «Nous donc aurons progressivement plus de données sur l’immunité chez les enfants testés. A ce moment-là, nous passerons à la vaccination chez cette tranche importante de la population».
Concernant les essais cliniques des différents vaccins effectués sur les enfants et adolescents, il a indiqué qu’ils concernent ceux compris dans la tranche d’âge des 12-17 ans. «C’est surtout cette population qui va à l’école, au lycée… et qui va se côtoyer pendant une certaine durée au sein des établissements scolaires. Il est donc absolument nécessaire de vacciner si on envisage une rentrée scolaire dénuée de risque de propagation de ce virus», a conclu le Dr Derrar sur ce chapitre.
Le délai pour vacciner les enfants pas encore défini
Pour l’heure, il n’y a pas encore de délai pour commencer la vaccination de la tranche d’âge concernée, certaines questions restant à compléter et d’autres à peaufiner. Pour atteindre l’immunité collective, la vaccination des plus jeunes est, ainsi, préconisée comme une mesure complémentaire indispensable à ce qui se fait actuellement, c’est-à-dire en plus de la vaccination des sujets âgés de 18 ans et plus. C’est, du moins, l’avis de plusieurs professionnels de la santé qui se sont exprimés sur le sujet, y compris ceux qui ne font pas partie du Comité scientifique.
Le Dr Mohamed Yousfi, président de la Société algérienne d’infectiologie, est favorable à la vaccination des enfants. En effet, outre son appel à accélérer le rythme de la vaccination, il recommande non seulement d’administrer les anti-Covid-19 à plus adultes de 18 ans et plus, mais également aux «enfants à partir de 12 ans», étant donné qu’ils sont devenus une «cible supplémentaire du variant Delta». Selon lui, il faudra même viser l’objectif de vacciner «90% de la population pour atteindre l’immunité» collective.
C’est également le même avis qui est partagé par le professeur Kamel Djenouhat, président de la Société algérienne d’immunologie. Pour lui, «dès que l’âge sera défini, il faudra passer à la vaccination des enfants». Il y a, selon ce professeur, il y a des propositions à limiter l’âge de la vaccination à partir de 6 ans ou de 12 ans… mais l’essentiel, c’est de bien étudier cette question et franchir le cap, surtout qu’il a été enregistré «des cas de contamination chez les enfants avec une l’infection des poumons ayant atteint les 50%», a-t-il fait savoir.
Autre point de vue d’un autre éminent professeur qui verse dans le même sens, à savoir le Pr Kamel Senhadji, premier responsable de l’Agence nationale de sécurité sanitaire. Il préconise, lui aussi, d’«élargir la vaccination aux enfants», ce qui sera de nature non seulement à les prémunir, mais aussi pour pouvoir «atteindre l’immunité collective», du moins, un taux assez appréciable à la rentrée sociale qui interviendra dans moins d’une vingtaine de jours. Pour ce faire, est-il utile de rappeler qu’il faut, selon lui, arriver un taux de 50% au début de l’automne prochain.
A noter également que le Pr Riyad Mahyaoui, s’appuyant sur le fait que le variant Delta qui représente actuellement 92% du total des cas de contaminations en Algérie et continue de progresser parmi la population, a indiqué ce variant n’épargne aucune tranche d’âge, les personnes âgées et celles présentant une comorbidité, les personnes en bonne santé, les jeunes et moins jeunes y compris les enfants. D’où sa recommandation de vacciner aussi les enfants qui, après avoir été seulement un vecteur de transmission, sont, à leur tour, arrivés à l’hospitalisation. Outre l’hôpital de Douéra, dans la wilaya d’Alger, qui avait fait état de plus d’une centaine de cas d’enfants atteints de Covid il y a quelques jours, il y a également eu des cas annoncés à Oran, où un adolescent de 14 ans a perdu la vie suite au coronavirus, et d’autres cas à Sétif où même des nourrissons avaient eu le Covid.
S’il ne s’agit pas maintenant de vacciner les enfants en bas âge et les nourrissons, le débat est sérieusement engagé pour ceux âgées entre 12 et 17-18 ans. Les avis des infectiologues, épidémiologistes et autres spécialistes semblent, pour le moment, tous converger dans un seul sens. Ils se disent favorables à la vaccination des enfants et adolescents à partir de douze ans. n