Le Conseil national des arts et des lettres (Cnal), présidé depuis mars dernier par Salim Dada, a récemment publié le bilan de ses activités de l’année 2019. Il en ressort que l’une des plus grandes réalisations du Cnal, pour l’année qui vient de s’écouler, est le numéro d’identifiant fiscal, qui répond ainsi à l’une des principales revendications des artistes depuis des lustres, celles de pouvoir facturer leurs prestations et leurs œuvres sans passer par des tiers.
A ce sujet, le président du Cnal Salim Dada nous déclare : «C’est un acquis important, parce que, tout d’abord, c’est une reconnaissance officielle du ministère des Finances que le métier d’artiste est reconnu en tant que métier à part entière. C’est-à-dire qu’il est soumis à fiscalisation, au suivit et à la transparence quant aux transferts d’argent.» Il ajoute que «l’octroi du numéro d’identifiant fiscal en tant que personne physique lui donne une certaine protection professionnelle et aussi une certaine liberté et une possibilité d’exercer son métier dans un épanouissement professionnel et personnel ». Il est important de souligner que cet acquis est une première en Algérie et était le sujet des revendications des artistes depuis des dizaines d’années.
Pour rappel, le dossier a déjà été soumis en 2013, mais cela n’as jamais abouti parce qu’il manquait des éléments. Salim Dada nous explique que « la clef du déblocage de ce dossier avec le ministère des Finances, c’est le travail qui a été fait pour l’indentification des métiers artistiques et donc le travail sur la nomenclature des métiers ».
La nomenclature des métiers, clef de la liberté pour les artistes
Afin de réaliser cette nomenclature, il y a eu quatre phases, un travail qui s’est fait sur plusieurs mois, depuis le mois de mai dernier, pour se clôturer à la fin du mois de décembre dernier. Dans une première liste, que Salim Dada avait rédigé lui-même, une première proposition de nomenclature de 140 métiers, en consultant les différents métiers, les différents établissements et les différents diplômes délivrés au niveau national et international. Une liste qui a été envoyée aux membres du Cnal, et chacun dans sa spécialité, a essayé d’«augmenter, de remanier, de justifier et de mettre à jour. Ce qui fait qu’au mois de juillet dernier, on était à la deuxième version de cette nomenclature avec une liste de 180 métiers».
La troisième phase de l’élaboration de cette nomenclature, c’était la consultation auprès des artistes, des professionnels, des universitaires et des experts, en organisant un cycle de « Séminaires du Cnal », par domaine, du 17 octobre au 28 novembre 2019. Salim Dada nous confie à propos des six séminaires qui ont été organisés que «c’était des séminaires utiles, parce que, en plus des remarques et des propositions de ceux qui était présents, c’était aussi un moyen de sensibiliser les artistes et les professionnels par rapport à cette question de l’identifiant fiscal et des métiers artistiques». Le président du Cnal ajoute que « ces séminaires étaient aussi utiles du fait d’être un espace d’écoute pour les artistes par rapport à leurs problèmes et à leurs préoccupations, qu’ils soient professionnels ou sociaux».
La quatrième et dernière phase de la rédaction de cette nomenclature s’est déroulée les 27 et 28 décembre passé. Et la liste a été officiellement clôturée le 31 décembre et a été envoyée au ministère des Finances. Le résultat est
que la nomenclature des métiers artistiques existe déjà depuis le 1er janvier 2020 sur la plateforme numérique de la direction générale des impôts.
Concrètement, à partir du moment où l’artiste a sa carte d’identité artistique, il peut directement faire une procédure en ligne et récupérer son numéro d’identifiant fiscal au niveau de la Direction des impôts. «Cela donnera à l’artiste la possibilité de vendre, d’acheter, de soumissionner et d’exporter ses œuvres en toute légalité», nous affirme Salim Dada. Il nous annonce également que la nouvelle carte d’artiste dénommée, aujourd’hui, carte d’identité artistique, va commencer à être délivrée à la fin de ce mois de janvier. Il nous souligne toutefois que les conditions de l’octroi de cette carte ont changé, en précisant que «ce ne sera pas une évaluation se basant sur un dossier administratif, mais il va y a avoir des auditions et des rencontres. C’est-à-dire que les artistes seront appelés à se présenter face à une commission à l’image de toute audition artistique.
La procédure sera aussi numérisée et toutes les nouvelles demandes de carte passeront par le site du Cnal qui sera incessamment fonctionnel ».
Renforcer l’écoute et assainir le métier d’artiste
Le président du Cnal nous confie également que sur le plan symbolique «le Conseil des arts et des lettres a réussi à se réconcilier avec les artistes mais aussi avec l’instance qui est le ministère. C’est un organe actif, qui est très à l’écoute et qui remplit amplement son rôle, celui de la consultation, de la recommandation et de la prospection et je pense que l’on peut attendre du Cnal plusieurs actions dans les prochain mois».
Salim Dada nous annonce l’organisation mensuelle de rencontres-débats animées par des artistes, des auteurs, suivie de prestations artistiques, qui vont être animées par les membres du Cnal. L’autre action annoncée, c’est la finalisation de la traduction trilingue de la nomenclature des métiers ainsi que la publication du Guide des métiers artistiques. A propos de cet ouvrage, Salim Dada souligne que «dans ce document, les 179 métiers seront définis en quelques lignes et destinés aux artistes, institutions et établissement concernés», en précisant que l’«on pense que les métiers c’est bien de les énumérer, mais c’est encore mieux de définir les tâches. Tout cela entre dans le cadre de l’assainissement des métiers de l’artiste qui, malheureusement, depuis un moment a été mis un peu à la clochardisation et à l’amateurisme ». Il affirme également que «tout cela entre dans le cadre de la réflexion du Cnal, car on considère que comme tout établissement qui a le devoir d’assainir son métier pour plus de professionnalisme, nous aussi, ensemble avec les artistes, on œuvre à plus de professionnalisme. Pour cela, le Cnal essaye de préparer le meilleur cadre possible pour le réaliser ».
Le projet phare du Cnal, dans le cadre de son programme d’action pour 2020, c’est la rédaction des propositions de textes de lois du statut de l’artiste. Salim Dada, estime à ce sujet que l’«on est très en retard par rapport à de nombreux pays dans le monde ». Ajoutant que «ce sera le texte référentiel sur tout ce qui touche à l’action et l’activité de l’artiste. Le texte va définir les conditions de travail de l’artiste, ses droits sociaux et professionnels ». Il insiste sur l’importance de cette action en mettant en exergue le fait que «chaque métier a besoin de textes de lois qui sont là pour protéger et définir les droits et devoirs avec un ancrage juridique». Tout en reconnaissant que « c’est un chantier qui est énorme », le président du Cnal déclare : «Je pense que maintenant, il faut faire quelques concessions et au moins un texte de lois qui rende service à la majorité des artistes et qui touche aux problématiques majeures de ce métier.»
Bilan du Cnal en chiffre et en dates
950 dossiers retenus pour traitement en 2019 (procédure de pré-traitement administratif au dépôt enclenchée au mois de mai).
608 cartes d’artistes validées en 2019 (dont des dossiers datant de 2015 à 2018).
Nombre total de cartes d’artistes : 10919.
Avril 2019 : Adoption du nouveau canevas du dossier de demande de carte d’artiste.
A partir du 2 mai 2019 : Mise en marche du nouveau schéma de traitement de dossiers, en 4 étapes et durée de 3 mois pour la délibération.
De mai à décembre 2019 : Nomenclature des métiers artistiques.
Identification de 179 métiers artistiques parmi les métiers des arts et des lettres, répartis en 7 catégories (musique, arts visuels, théâtre, danse, arts du spectacle, cinéma, audiovisuel et animation, littérature).
De avril à décembre 2019 : procès pour l’adoption du ministère des Finances de la nomenclature du Cnal et mise en ligne du numéro d’identification fiscal pour les artistes.
De septembre à décembre 2019 : Exposé de motifs pour le remaniement du Décret exécutif (11-209) de la création du Cnal et rédaction du texte juridique de la carte d’identité artistique. Version améliorée et procès arrivé en phase finale au secrétariat général du gouvernement (Dernière réunion le 15/12).
Unesco : désignation du président du Cnal, Salim Dada, en tant que Point focal de l’Unesco en Algérie pour la Convention 2005 et participation de quelques membres du Cnal, depuis octobre 2019, aux activités liées à la rédaction du rapport périodique quadriennal de l’Algérie 2020 (RPQ). Dépôt statuaire du 1er RPQ Algérie de la Convention 2005 avant le 30 avril 2020.