Par Feriel Nourine
Le Gouvernement semble décidé à poursuivre sa politique de réduction des importations en usant d’une rationalisation qui n’exclurait aucun produit ou matière première susceptible d’être soumis à cette démarche.
C’est en tous les cas dans cette logique que pourrait s’inscrire la communication sur la plateforme numérique dédiée à l’encadrement de l’importation, présentée en fin de semaine dernière par le ministre du Commerce et de la Promotion des exportations en réunion du Gouvernement. Le département de Kamel Rezig compte bien avoir un œil sur l’ensemble des activités du commerce extérieur et affiche explicitement sa détermination à aller jusqu’au bout dans cette mission, comme en témoigne cette plateforme que ce dernier a présentée comme étant un dispositif à travers lequel l’objectif visé est « la régulation des importations et leur rationalisation en vue de mieux protéger la production nationale et de préserver nos réserves en devises ».
Alors que la régulation du marché local est loin d’être ce qu’il avait promis à son arrivée à la tête du secteur, comme en témoignent la succession de pénuries de produits alimentaires et la flambée des prix à laquelle s’est heurté le citoyen, M. Rezig semble se plaire à orienter ses objectifs vers le commerce extérieur où il est chargé d’alléger la facture en devises du pays en réduisant les importations.
Pour ce faire, les mesures de restrictions faites aux importations ont été multipliées par la mise en place de contraintes administratives, à travers notamment de nouveaux documents que les importateurs doivent joindre à leurs dossiers pour prétendre à une domiciliation bancaire pour toute opération d’achat à l’étranger de matières premières ou de produits et de marchandises destinées à la revente en l’état.
Sur ce registre, c’est sans doute la note adressée, en avril dernier, par l’Abef aux directeurs des banques et des établissements financiers, obligeant toute domiciliation bancaire à un document délivré par les services de l’Agence nationale de la promotion du commerce extérieur (Algex), un document qui atteste de la non-disponibilité du produit importé sur la liste de la production locale, qui fait le plus polémique.
Il ne manquait plus que ce type de mesure pour bloquer une bonne partie des importations et pousser de nombreuses entreprises visées à ralentir considérablement leur activité, alors que d’autres les ont simplement cessées face à une mesure, de surcroît difficile à appliquer au vu du flou qui entoure la liste des produits qui sont réellement disponibles au niveau du territoire national. Pendant ce temps, de nombreuses filières du marché local ont connu des perturbations fortement ressenties chez les citoyens, notamment au niveau des officines où des médicaments manquaient à l’appel.
Dans une lettre adressée récemment au ministre du Commerce, l’Association nationale des opérateurs économiques algériens ont réclamé le report de l’application des mesures exigeant le document d’Algex dans les opérations d’importation jusqu’à «la mise à jour de la liste des produits nationaux interdits à l’importation», «la libération des conteneurs saisis dans les ports» et la «levée du gel des licences d’importation obtenues par les importateurs avant la délivrance de l’instruction du ministère». Récentes mesures qui paralysent l’activité des 13 000 entreprises d’importation que regroupe l’association des importateurs et au moins une quarantaine de producteurs. Ces chiffres risquent d’augmenter au fil des jours à cause du manque d’intrants et de matières premières.
Pour rappel, les secteurs de l’agriculture et de l’industrie pharmaceutique avaient récemment subi de nombreuses tensions à cause des blocages des importations nécessitant l’intervention de leurs tutelles respectives pour débloquer la situation. Dans le secteur de l’industrie pharmaceutique, la conséquence directe d’une telle restriction a été un début de pénurie de la Ventoline dont les containers étaient bloqués au port. Il a fallu l’intervention directe du ministère de l’Industrie pharmaceutique pour la levée de cette autorisation. Il avait expliqué que «cette démarche s’inscrit dans le cadre de «la cohésion gouvernementale et la concertation intersectorielle en vue d’assurer la disponibilité des produits pharmaceutiques et dispositifs médicaux, ainsi que la protection et la promotion de la production locale».
De même, pour le secteur de l’agriculture, après de fortes tensions, les importateurs de produits nécessaires à l’activité agricole destinés à la revente en l’état, sont également dispensés de l’obligation de présenter le document délivré par l’Algex. Le ministère de l’Agriculture avait expliqué que la levée de cette procédure administrative «s’inscrit dans le cadre de la stratégie intersectorielle en matière de développement des filières agricoles qui vise à assurer la disponibilité de ces matières premières aux agriculteurs au moment opportun».
De plus, après les nombreux appels sur les risques d’une forte perturbation dans la disponibilité des articles scolaires, les importateurs des matières premières nécessaires pour leur fabrication ont également été dispensés du document d’Algex, mais de nombreux autres secteurs économiques sont toujours bloqués à cause de cette procédure considérée comme «purement bureaucratique». <