L’Etat veut rompre avec l’opacité qui a caractérisé jusqu’ici la gestion de certaines communes du pays, qui s’est traduite, dans certains cas, par des scandales financiers et de dilapidation des derniers publics. Pour ce faire, un dispositif de suivi de la situation financière des communes a été mis en place.

Par Hakim Ould Mohamed
Le ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales vient de mettre en service un système informatisé pour le suivi de la situation financière des communes. C’est ce qu’on peut lire dans un communiqué rendu public, hier, par le département de Brahim Merad, soulignant qu’il s’agit, plutôt, d’une plate-forme digitale permettant d’avoir sous la loupe la situation financière des 1541 communes que compte le pays. Un tableau de bord budgétaire de chacune de ces communes est mis à jour chaque mois afin de permettre une vue d’ensemble sur l’état d’exécution des budgets et leur affectation et d’intervenir, si besoin il y a, afin de corriger les disparités et les retards en matière de développement. Mais pas seulement. Le ministère de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du Territoire souligne, dans son communiqué, que «dans le cadre des efforts déployés par le ministère de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du Territoire pour la modernisation de la gestion locale, et en vue de consacrer le principe de transparence dans la gestion des deniers publics et d’assurer une meilleure efficacité dans la mise en œuvre du budget, un système informatisé a été mis en service, le 11 décembre courant, pour assurer un suivi permanent de la situation financière de chaque commune à chaque fin de mois». Plus explicite sur la nature de cette plate-forme, le département de Brahim Merad explique qu’il s’agit d’un système à quatre niveaux qui concerne les services de la commune, de la daïra et de l’administration centrale, et qui «a pour objectif d’informer les acteurs au niveau local sur la situation réelle et exacte de la liquidité financière au niveau des trésoreries communales et, partant, définir les priorités dans la mise en œuvre des dépenses publiques».
Ce système permettra également à tous les responsables locaux et centraux de «contrôler l’utilisation des allocations financières, de déterminer le niveau des dépenses globales et celui du recouvrement des recettes, ainsi que les fonds disponibles à chaque fin de mois et à chaque fin d’exercice financier, mais aussi d’identifier les difficultés financières pouvant survenir dans chaque commune, ce qui permettra de prendre les mesures anticipatives nécessaires pour les éviter», conclut la même source. Il s’agit pour ainsi dire d’un système révolutionnaire qui vient rompre avec l’opacité qui a caractérisé jusqu’ici la gestion de certaines communes du pays, laquelle s’est traduite, dans certains cas, par des scandales financiers et de dilapidation des derniers publics. Mais pas seulement, des dizaines de communes d’Algérie étaient plongées des années durant dans le sous-développement et l’isolement. Ce pourquoi, un programme de développement spécial, dédié aux «zones d’ombre», a été initié par le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, dont la finalité est d’en finir avec l’isolement de certaines régions et de rattraper leur retard en matière de développement et d’accès aux services de l’Etat. Le rapport annuel 2022 de la Cour des comptes, publié voici quelques semaines, fait le constat on ne peut plus franc des disparités flagrantes en matière de développement. Le rapport a révélé que près des deux tiers des communes, soit 958 sur 1.541 communes du pays, sont classées «pauvres», alors que les communes riches ne dépassent pas les 7%. Un jugement sans appel justifiant l’utilité pressante du dispositif de suivi mis en place par le ministère de l’Intérieur. Dans son rapport, la Cour des comptes a pointé d’importantes lacunes dans l’attribution des dotations globales de fonctionnement et d’équipement au profit des communes les moins dotées en ressources dans le cadre des missions de la Caisse de solidarité et de garantie des collectivités locales (CSGCL), qui est un établissement public à caractère administratif, sous tutelle du ministère de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire, chargée de mettre en place une solidarité financière inter-collectivités locales. Les différentes lois sur le règlement budgétaire de ces dernières années ont levé le voile également sur une faible consommation des budgets par certaines institutions nationales et locales, alors que les besoins en développement sont importants. Cette situation contraste également de manière saisissante avec les centaines de projets en souffrance au niveau local quand bien même les budgets étaient disponibles et débloqués au profit des collectivités. Pour ainsi dire, le système de suivi de la situation financière des communes, mis en ligne par le ministère de l’Intérieur, vient rompre avec cette frivolité à consommer les budgets, en contradiction avec les besoins de développement. <