Après la clôture de la 16e édition du film amazigh marquée par un bilan mitigé sur le plan du contenu artistique et thématique des films présentés en compétition, la prochaine édition du FCNCA amazighe sera celle de la qualité ou ne sera pas ? C’est en tout cas le vœu de l’universitaire Tahar Boukella, président du jury qui a lancé un pavé dans la mare dans le fleuve tranquillement médiocre du cinéma amazigh.
A l’exception de quelques films, du reste, plébiscités par le jury et salués par certains observateurs avertis qui ont suivi les projections, la majorité des films présentés dans les différentes catégories n’arrivent pas à se détacher de l’amateurisme outrancier d’un festival que l’on se désole de voir devenir le réceptacle d’un rendez-vous cinématographique de circonstance, une rencontre créée juste pour servir d’alibi et d’un exutoire par le cinéma pour une revendication identitaire. Mais le jury, par la voix de son président, l’universitaire Tahar Boukella, ne s’est pas trompé Son intervention devant les officiels et le public présent en nombre, lors de la cérémonie de clôture du festival est un véritable plaidoyer pour le développement réel du cinéma amazigh. Reconnaissant la qualité de certains courts métrages et documentaires dont « le niveau leur permet d’être présentés dans les plus grands festivals du monde », Tahar Boukella a interpellé les pouvoirs publics, leur demandant la prise en charge du développement du cinéma amazighe, à travers un plan d’urgence. « Un plan Marshall est nécessaire et doit être lancé afin d’élever le niveau des productions cinématographique d’expression amazighe. » L’intervenant a sérié les différentes actions qui doivent être déployées séance tenante pour atteindre cet objectif. L’octroi de bourses d’étude pour la formation des jeunes scénaristes, réalisateurs et les comédiens, l’accès au soutien direct des jeunes porteurs de projets de films au Fonds de Développement de l’Art, de la Technique et de l’industrie Cinématographique (FDATIC), la création d’un fonds spécial du développement du film amazigh, sont les principales propositions qu’il faut vite mettre en œuvre pour réaliser un sursaut qualitatif de la production filmique du domaine amazighe. Le seul moyen de tirer vers le haut ce segment du cinéma algérien qui vivote dans l’amateurisme est de concrétiser le rêve d’Abderahmane Bouguermouh, adaptateur au cinéma, avec le brio que tout le monde lui reconnait, de la « Colline oubliée » de M. Mammeri et qui a œuvré durant toute sa vie et sa carrière de cinéaste au service du cinéma amazighe. Les réalisateurs dont les films ont été « recalés » sont les seuls à être désappointés et surpris par le jugement prononcé par le président du jury qu’une partie de la salle de la Maison de la culture M. Mammeri a accueilli avec des applaudissements. Tahar Boukella qui a pris beaucoup de précautions oratoires pour annoncer que l’Olivier d’or du meilleur long métrage de fiction ne sera pas décerné, ne se gênera pas à dire les quatre vérités en face des auteurs (réalisateurs, scénaristes, comédiens) des films qu’il a invités à revenir aux pré-requis théoriques et pratiques nécessaires à la fabrication d’un film et d’une fiction. Les trois longs métrages « zappés » par le jury qui considère qu’ils ne sont pas éligibles à la plus haute distinction du festival pèchent par beaucoup de défauts, des fautes d’amateurs impardonnables : des scènes inutilement longues, une absence de rythme dans la narration, maîtrise approximative des techniques du cinéma (découpage, montage, cadrage et mouvement univoque de la caméra). A cela s’ajoute, la faiblesse du contenu thématique. Les auteurs de la majorité des films amazighs usent et abusent des mêmes thèmes. L’amour, les rapports passionnels, les conflits d’intérêts familiaux ou autres ; les us et les coutumes, le mariage… sont de thèmes récurrents mais souvent traités avec une légèreté qui confine à l’anecdotique, sans doute en raison de la faiblesse dans l’écriture du scenario et une maîtrise imparfaite des techniques de la narration. Tahar Boukella appellera les jeunes porteurs de projets de films à sortir des sentiers battus, « à éviter les clichés », en abordant des sujets tabous et autres faits qui agitent la société algérienne. Il y a tant de sujets d’ordre social, économique et politique, comme la religion, la corruption… qui sont susceptibles d’être portés au cinéma, suggère le président du jury qui s’est félicité de l’émergence d’une bonne cuvée de comédiens et de réalisateurs qui peuvent « aller loin », constituer l’élite cinématographique de demain. Pourvu qu’ils persévèrent et qu’« ils ne se tiennent pas la tête », a-t-il conseillé les jeunes lauréats de l’olivier d’or du court-métrage, du prix spécial du jury, et des deux comédiens récompensés pour l’interprétation masculine et féminine.
PALMARES
Olivier d’or du meilleur court métrage : Lumja (la vague) de Omar Belkacemi.
Prix spécial jury à l’œuvre de Omar Amroun, Ta3kkemt n Tudert (Une peine à vivre), une fiction de 15mn.
Olivier d’or du meilleur documentaire : Izmulen n igraren de Oussama Rai qui a retracé les traditions du Mazb
Olivier d’or de l’interprétation masculine : Salah Ouamar (Amendil – le foulard) / Olivier d’or de l’interprétation féminine : Djedjiga Makhoukhène (Amndil).