Après des mois de silence quant aux chiffres réels des résultats de la campagne moissons-battage de l’année 2021, sur lesquels l’ancien ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Abdelhamid Hamdeni, a semblé observé une discrétion considérée par certains comme de la «rétention», se contentant de dire qu’ils sont «en deçà des objectifs escomptés», son successeur lève le voile sur une récolte synonyme de contre-performance et de recours prochain à l’importation de blé.Par Bouzid Chalabi
Le volume de la baisse de la récolte est important et est estimé à 13 millions de quintaux. Il s’agit, en effet, de la troisième baisse consécutive en termes de récoltes. «Nous sommes bien loin de la moisson exceptionnelle de 2018 qui s’était soldée par un volume de près de 60 millions de quintaux», font remarquer des professionnels du secteur. En effet, le propos tenu jeudi dernier par le premier responsable du secteur, Abdelhafid Henni, devant les députés, ne devrait pas laisser sans réaction les autorités dans la mesure où le très piètre volume récolté, soit 13 millions de quintaux de céréales toutes variétés confondues, à savoir les blés dur et tendre et orge, est inquiétant pour prétendre parvenir à l’autosuffisance alimentaire.
Certes, la sécheresse qui a sévi l’année dernière dans de nombreuses régions du pays à vocation céréalière est à l’origine de la faiblesse des résultats de la campagne, mais pas au point de tomber à un niveau de récolte aussi bas dès lors où la campagne de labours s’est déroulée dans de bonnes conditions. Toutefois, le ministre a reconnu que l’écart existant entre la récolte de 2021 et celle de 2020, qui a régressé de 35 millions de quintaux à 13 millions de quintaux, est très important». A ce propos, un député s’est demandé s’il n’y avait pas d’autres raisons à cet état des lieux catastrophique. Ce à quoi le ministre a répondu que «les conditions n’étaient pas propices pour espérer, ou tout au moins s’attendre, à un léger recul en la matière». A propos de recul, il importe de rappeler que les récoltes de ces trois dernières années étaient en dents de scie. Pour preuve, la collecte de la saison 2018-2019, déjà en baisse, était de l’ordre de 27 millions de quintaux. Une année auparavant, l’OAIC a réalisé 34,8 millions de quintaux, en légère hausse par rapport à la campagne 2015-2016, qui a clôturé à 34,3 millions de quintaux. Toujours dans ce même raisonnement, faut-il savoir que la meilleure campagne a été celle de 2017-2018 grâce à une production céréalière évaluée à 60,57 millions de quintaux de céréales. Un volume record qui, soit dit au passage, a permis à l’Algérie de ne pas importer de blé dur pour l’année. Mais pas seulement, le pays s’est permis de réaliser des opérations d’exportation de quantités importantes d’orge à la même période. Ce qui ne risque pas de se répéter dès lors où le ciel est de moins en moins clément en matière de pluviométrie. «Ce qui rend les conditions de culture moins propices pour espérer des rendements à l’hectare encourageants», avancent les céréaliculteurs locaux. Certains ne sont pas étonnés des faibles récoltes réalisées à l’issue de la campagne de 2021 par le fait que la sécheresse a été plus accrue pendant la période montaison, c’est-à-dire au moment où pour sa bonne croissance, l’épis a besoin d’eau. Tout comme le ministre a avancé que la pluviométrie est un facteur essentiel dans le processus de production céréalière, il a par ailleurs déploré que «d’importants périmètres dans le sud du pays ne sont pas exploités alors que la disponibilité de l’eau souterraine n’est plus à démontrer».
Poursuivant son argumentaire, le ministre a indiqué que les statistiques produites par son département pour la dernière saison font ressortir un important déficit «en matière de quantités collectées». Et l’un des aspects de cette «déroute» de la filière céréale tient notamment dans la très mauvaise performance des agriculteurs dans le segment «orge», où seulement 135 000 quintaux ont été collectés pour des besoins estimés à plus de 8 millions de quintaux. «C’est pour dire qu’avec un tel volume de déficit en orge on peut d’ores et déjà mesurer l’ampleur de la crise qui s’annonce, étant donné que cette matière première est un aliment complémentaire indispensable pour les besoins de croissance des ovins», a confié le ministre. Abondant dans ce sens, il dira que «la crise ne sera résorbée qu’en recourant massivement aux importations».
En définitive, la piètre récolte de céréales de la campagne moissons-battages 2021 va se traduire par une hausse sensible des volumes d’importation et, par ricochet, s‘attendre à une facture plus salée et qui risque même d’exploser, tant les cours mondiaux des céréales primaires sont en constante ascension. En somme, l’ardoise va peser lourdement sur le budget de l’Etat.
Achat de 630 000 tonnes de blé tendre
L’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) ouvre le bal des approvisionnements 2022. En effet, l’OAIC s’apprête à réceptionner 630 000 tonnes de blé meunier récupérées d’un avis d’appel d’offres, lancé par ses soins au mois de décembre avec pour condition de livraison en mars prochain. Autrement dit, l’Office a réglé un appel d’offres retardé pour l’achat de blé de meunerie.
Notons que pour cette année, la concurrence du blé russe sera plus forte depuis qu’il répond aux exigences phytosanitaires exigées par l’OAIC. Ce qui laisse penser qu’il y aura débat autour des origines retenues par l’acheteur algérien car il faut s’attendre à ce que la France cède du terrain vis-à-vis du marché algérien.
Rappelons que le Conseil international des céréales (CIC) a révisé à la hausse son estimation de production mondiale de blé à 781 millions de tonnes contre 777 affichés précédemment. Cela est notamment dû à l’Australie dont la production est revue en hausse à 35,5 millions contre 32 millions auparavant.