Quelques cas ont suffi à faire de Blida un dangereux foyer de coronavirus. La rumeur, «qui a de grandes oreilles», a rapidement amplifié le phénomène, et la peur aidant, a permis de faire circuler les nouvelles les plus invraisemblables.
«La ville serait en phase de passer sous quarantaine», idem pour Boufarik qui, sans enregistrer un seul cas parmi la population, «passe, à cause de la structure hospitalière qu’elle abrite, pour un épicentre de la maladie». Ainsi, les résidents des deux villes «seraient interdits d’entrée à Alger», «Bab D’Zaïr», «la rue d’Alger» (rue de la Liberté) au centre-ville de Blida» fermées aux quartiers environnants». Sur le boulevard Laïchi-Abdallah, à hauteur de la rue Saâdi, un jeune homme au téléphone tente de faire entendre raison à une sœur qui l’appelle d’Ouled-Yaïch pour lui apprendre que «Bab D’Zaïr est fermée» et que «personne ne peut plus entrer ou sortir de la ville». Il lui explique calmement que cela n’avait aucun lien avec le coronavirus et que la police avait lancé une opération «coup-de-poing» contre le commerce illicite qui s’était progressivement emparé des trottoirs puis de la chaussée entravant aussi bien la circulation des piétons que celle des automobilistes. Il n’a pas le temps de terminer avec sa sœur que Brahim, commerçant, émet son avis qui relance la rumeur : «Cette chasse aux vendeurs à la sauvette et à leurs étals est destinée à empêcher les femmes de sortir pour les achats du Ramadhan à cause du coronavirus.»
A la rue d’Alger, la chaussée et les trottoirs sont dégagés mais les vendeurs à la sauvette ne sont pas allés très loin, ils se sont installés dans les rues adjacentes qui mènent vers «Placet Laârab»… Des policiers présents tout au long de l’artère les empêchent de revenir. A voir ces policiers «squatter» ainsi les trottoirs, sous l’œil des anciens occupants relégués dans les venelles secondaires, on a l’impression qu’ils se livrent à un jeu de cache-cache qui ne durera pas longtemps avant que les choses ne reprennent leur cours normal.
Plus loin vers la place du 1er-Novembre (Placet Ettout), sur la droite en venant de Bab D’Zaïr, la rue Abdallah, rue commerçante par excellence, où il est habituellement difficile de se frayer un chemin tant elle est bondée, est aujourd’hui aux deux-tiers vide. De l’aveu de Saïd, vendeur à la sauvette installé à même le trottoir, à l’autre bout de la rue vers la sortie nord, la fréquentation a nettement diminué. «C’est comme ça depuis ce matin…», dit-il, ouvrant les bras en signe de résignation.
A droite, en longeant le marché couvert de «Placet Ennsara», au rez-de-chaussée du centre commercial à l’entrée de la rue Ali-Berzali qui mène vers Bab D’Zaïr, un magasin de vêtements pour femmes «spécial mariage» nous accueille, vide. La propriétaire debout près du comptoir au fond, nous apprend que «c’est comme ça depuis une semaine. «Pas un seul client», explique le jeune vendeur de la boutique d’en face. «Depuis quelque temps déjà, nous mettons trois à quatre jours pour vendre quelque chose, avec le coronavirus, c’est pire, il n’y a tout simplement plus de vente». La propriétaire du magasin pense que les gens préfèrent se terrer chez eux parce qu’ils ont peur, «seules les femmes qui préparent un mariage sortent pour les achats et elles ne sont pas nombreuses».
Plus loin, de l’autre côté du marché couvert, Djamel, vendeur dans un magasin de produits cosmétiques confirme : «Il n’y a pas de clients, pourtant c’est les vacances. D’habitude, les gens font la queue avant même l’ouverture.» Le magasin est effectivement vide, désespérément vide.
La même chose dehors, les rues les plus commerçantes de Blida sont presque désertes, on s’y déplace avec aisance. La rue des Kouloughlis ou «Zenkat Essouk» qui ne désemplissait jamais et qu’il est toujours difficile de traverser, est assez fluide, les marchands de fruits et légumes ont cependant une appréciation plus pondérée que celle des autres commerçants. Ils ne se plaignent pas vraiment, même si, on le voit à leurs étals, les ventes ne sont pas si importantes que cela…
A Bab D’Zaïr, pas beaucoup de monde non plus, au niveau des arrêts. Les bus qui mènent vers Ouled-Yaïch et Beni Méred démarrent sans faire le plein. Oui les gens ont peur, mais pas plus qu’ailleurs. Avec un peu de sensibilisation et une communication franche et transparente, les gens peuvent s’adapter.
Conférence de presse
Une conférence de presse a été organisée dans la salle de conférence de la wilaya sous la présidence du chef de cabinet de la wilaya de Blida, M. Aït Ahmed et des professeurs Bouhamidi, chef de service de réanimation au CHU Frantz-Fanon et Bouamra Abderrazak, chef de service épidémiologie et médecine préventive au CHU Frantz-Fanon de Blida.
La conférence de presse visait à informer les journalistes et les membres des associations de la société civile des mesures prises au niveau de la wilaya afin de juguler l’épidémie de Covid-19. L’apport de tous a été vivement souhaité afin d’aider le citoyen à dépasser cette crise sans précédent. Les professeurs présents ont donné les informations nécessaires pouvant aider à une meilleure connaissance du coronavirus. Aucun bilan n’a été présenté cependant. Il faudra se contenter des chiffres donnés par le ministère de la Santé.
Arrêté du Wali
La principale information reste l’arrêté préfectoral promulgué par le wali de Blida visant la fermeture des commerces non nécessaires à la vie des citoyens qui entre immédiatement en vigueur. A la question de savoir quels sont ces commerces «non nécessaires» à la vie des citoyens, le chef de cabinet a parlé de certains établissements tels que les cybercafés, les piscines, les hammams…
Au sujet des rumeurs qui courent à propos du coronavirus, le chef de cabinet a tenu à rassurer la population quant aux capacités de la wilaya à faire face à toute éventualité. Les professeurs présents ont de leur côté répondu à certaines inquiétudes quant à la prophylaxie anticovid-19. n