PAR INES DALI
A peine la situation épidémique de l’Algérie s’étant stabilisée, écartant le danger de la quatrième vague, que le relâchement total refait surface. Le nombre de cas confirmés de Covid-19 qui a reculé jusqu’à 316 cas ce week-end marque une baisse significative, mais, en même temps, renseigne que le virus est toujours là, en circulation. Et tant que le coronavirus continue de circuler parmi une population qui a abandonné les gestes barrières et qui, de surcroît, est mal vaccinée, le risque que le virus en vienne à contaminer un plus grand nombre n’est pas écarté.
Les conditions actuelles le laissent penser, selon les déclarations des professionnels de la santé. Plus grave encore, la probabilité de «l’émergence d’une cinquième vague de l’épidémie en Algérie n’est pas exclue», a affirmé le Dr Mohamed Melhag chercheur en virologie. Il appuie sa déclaration en citant «trois indicateurs scientifiques précis». «Le premier est la baisse de la vigilance et le relâchement dans le respect des gestes barrières et l’application des protocoles sanitaires, le deuxième est le faible taux de vaccination, tandis que le troisième a trait à la mutation du virus qui est capable de se déployer sous forme d’autres variants», a-t-il indiqué lors de son intervention sur Radio Sétif.
Notant que les chiffres des contaminations sont stables, il a confirmé que «l’Algérie est en train de vivre le début de la fin de la quatrième vague», tout en soulignant, toutefois, que «nous n’en sommes pas encore sortis» et qu’elle est «encore très répandue». C’est une mise en garde que la partie de la quatrième vague n’est pas encore finie alors qu’une cinquième guette le pays. Le spécialiste virologue a prévenu que le non-respect des mesures préventives prolongera la présente vague qui pourrait durer encore «plusieurs jours ou plusieurs semaines, en raison de la présence de foyers du virus mais aussi du sous-variant d’Omicron BA.2 qui a une capacité de transmission très rapide, et de la possible émergence d’autres variants de Covid-19». Il est donc impératif que la population soit immunisée, a estimé le Dr Melhag. Pour lui, «la meilleure façon d’obtenir cette immunité collective est la vaccination. C’est la seule solution qui permet d’aller à une ouverture totale et, partant, de reprendre une vie normale». Commentant les hypothèses selon lesquelles le variant Omicron serait «moins dangereux», ce chercheur en virologie s’est montré prudent et préfère relativiser. «Ceux qui pensent que le variant Omicron n’est pas dangereux se trompent. Il ne faut pas oublier qu’il a causé plus de 250.000 morts dans le monde. Omicron est toujours dominant et pourrait faire apparaître d’autres mutations à l’avenir», a-t-il prévenu.
Immunité collective et vaccination
Faisant référence à l’immunité par infection que pourrait procurer la forte transmission d’Omicron, il a relevé qu’il a été «prouvé de manière scientifique que l’immunité naturelle d’Omicron ne protège pas contre de futurs variants qui pourraient apparaître, il ne faut donc pas s’y fier». Dans ce sens, et se basant toujours sur des arguments scientifiques, il a ajouté qu’«il a été confirmé qu’une personne atteinte par le Covid et guérie mais sans être vaccinée pourrait traîner, pendant plusieurs mois, de nombreux séquelles comme la fatigue, voire d’épuisement, la gorge sèche, des douleurs articulaires, sans oublier la perte du goût et de l’odorat».
Le Dr Mohamed Yousfi, président de la Société algérienne d’infectiologie, n’en pense pas moins. Même s’il affirme que la situation épidémiologique actuelle s’est «nettement améliorée avec moins de 400 infections par jour», il reste que l’inquiétude n’est pas totalement dissipée en raison de la faible vaccination qui peine à dépasser les 30% de la population cible de 20 millions d’Algériens, alors que le pays doit vacciner «au moins 70%» de cette population, selon le Dr Yousfi.
Il a indiqué qu’il y a «moins d’afflux dans les hôpitaux, que ce soit pour les urgences qui ont baissé de 25% ou encore pour les hospitalisations», tout en rappelant, par la même occasion, que le nombre des contaminations durant la quatrième vague s’est caractérisé par «la présence de deux variants, le Delta auquel est venu s’ajouter l’Omicron, très contagieux». Ce qui a fait que «les hospitalisations ont augmenté avec un taux d’occupation des lits de 80%» à l’hôpital de Boufarik où il exerce en tant que chef de service infectiologie. Pour lui, une telle situation de stabilité ne peut être maintenue que si la vigilance est également maintenue. D’où son appel à «ne pas céder au relâchement» et à continuer à «observer les mesures de prévention». La vaccination est l’autre recommandation que le Dr Yousfi considère «impérative» car «l’Omicron continue de circuler et de contaminer», en plus du fait que «d’autres variants peuvent faire leur apparition à tout moment», a-t-il prévenu à son tour. C’est ainsi qu’il a réitéré son appel à intensifier la vaccination, cela d’autant que «le virus continue d’évoluer dans d’autres pays, notamment ceux faiblement vaccinés», a-t-il dit, s’appuyant sur les mises en garde de l’Organisation mondiale de la Santé (Oms).
Cette dernière a, en effet, appelé à ne pas baisser la garde, car «il y a actuellement dans le monde des conditions idéales pour l’émergence d’une nouvelle souche plus contagieuse et plus dangereuse du coronavirus», a prévenu le directeur général de l’OMS Tedros Adhanom Ghebreyesus, dans un discours prononcé, vendredi, lors de la Conférence de Munich sur la sécurité. Après avoir indiqué que la vaccination couvrait un large éventail de la population dans certains pays mais, hélas, pas dans d’autres, il a tenu à noter que «le variant Omicron a provoqué des cas plus graves de la maladie», avant de remettre en cause «les discours dangereux sur la fin de la pandémie de Covid-19». Le directeur général de l’OMS a, cependant, estimé que la communauté internationale possède «désormais des outils et les technologies modernes pour mettre fin à la pandémie de coronavirus en 2022» et que l’Organisation qu’il dirige a inscrit cette pandémie en tant qu’urgence mondiale. «Mettre fin à cette pandémie doit être au centre de notre attention, et les leçons que nous avons tirées doivent être apprises», a-t-il conclu.