Des artisans-boulangers «minoritaires» qui ont décidé d’augmenter leurs prix de la baguette de pain ordinaire. Et de nouveau, la controverse sur le bon tarif à pratiquer par rapport à la cherté des intrants et de la faiblesse de la marge bénéficiaire ! Une querelle qui ne dit pas son nom entre les fourniers qui ont décidé de faire payer davantage le consommateur et des organisations associatives qui considèrent que leur initiative n’est pas dans l’intérêt de la profession qui cherche depuis des années à négocier une marge bénéficiaire plus importante .
Par Bouzid Chalabi
De nombreux artisans-boulangers ont décidé d’augmenter à 12,5 dinars le prix de la baguette ordinaire, soit 2,5 dinars de plus que le tarif pratiqué d’ordinaire. Ces professionnels de la boulangerie ne sont certes pas nombreux à agir de la sorte – des associations de la filière parlent de «minorité»- mais la tentation est grande chez beaucoup d’entre eux d’«ajuster» les prix en fonction de la «cherté des intrants». Le surprenant dans ce phénomène est que les artisans-boulangers qui ont décidé de revoir leur grille tarifaire ont agi sans concertation avec leurs représentants socioprofessionnels pourtant très présents sur le terrain.
Présence médiatique uniquement ? Perte de représentativité ? Le débat, actuellement, est surtout économique et concerne, une nouvelle fois, le pouvoir d’achat du consommateur algérien. Il n’empêche que des associations du secteur ont réagi hier, à l’exemple de la Fédération des boulangers affiliée à l’Association nationale des commerçants algériens (ANCA). Son président, Omar Ameur, a qualifié d’«irréfléchie» l’initiative des artisans-boulangers qui ont décidé seuls de relever leurs prix.
Dans une déclaration à Reporters, M. Ameur n’a pas caché son agacement d’une décision qui, dit-il, «n’a, heureusement, pas fait tâche d’huile». «Les échos qui me sont parvenus jusqu’ici de plusieurs wilayas ne rapportent que des cas isolés», ajoute-t-il. «Ils ne sont pas nombreux, les boulangers qui ont décidé de passer le prix de la baguette ordinaire à 12,5 dinars. Nous avons constaté au 1er janvier un nombre plus important des artisans qui ont revu à la hausse leur prix, mais le phénomène s’est rétracté au deuxième jour du début de l’année», a-t-il affirmé.
Certains associatifs, qui ont fait «marcher le téléphone» durant le premier jour de l’an, selon l’expression de l’un d’eux, ont avancé un taux de 20% des artisans-boulangers qui ont décidé d’augmenter d’eux-mêmes le prix de la baguette. Une réaction qui ne rend pas service aux intérêts de la fédération, juge Omar Ameur. «Ils sont au courant que leurs doléances formulées depuis quelques années sont prises en considération au niveau du gouvernement et non plus par le ministère du Commerce comme auparavant», a-t-il avancé à leur sujet. Ceci, avant d’ «espérer» que les pouvoirs publics réagissent vite, notamment en tenant leur promesse de laisser les artisans-boulangers «augmenter la marge bénéficiaire sur la baguette de pain ordinaire». «Qui jusqu’ici, a-t-il souligné, est des plus insignifiantes au point où des centaines de boulangers ont, soit fermé boutique, soit se sont consacrés à produire différents types de pain amélioré» ou «complet» dont les prix varient entre 20 et 100 dinars la baguette, comme il a été observé dans des boulangeries de certains quartiers d’Alger. D’autres artisans ont préféré se consacrer à la pâtisserie et à la pizza, glissera encore notre interlocuteur.
L’UGCAA affiche son désaccord
Pour sa part, l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) s’est démarquée, samedi dernier dans un communiqué, des appels à augmenter le prix de la baguette subventionnée à 15 DA, assurant que toutes les revendications légitimes des boulangers avaient été soumises aux autorités publiques. L’UGCAA avertit que les auteurs d’une hausse du prix de la baguette de pain se retrouveront exposés aux sanctions en vigueur». L’UGCAA a rappelé par ailleurs que toutes les revendications légitimes des boulangers «ont été soumises aux pouvoirs publics pour les prendre en charge, notamment après la hausse des prix des intrants à l’instar de la levure et des améliorants, la question de la marge bénéficiaire». Il n’est pas dans l’intérêt de la profession d’augmenter les prix de manière aléatoire, a-t-elle prévenu. A l’heure où nous mettions sous presse, on a appris que la Fédération des boulangers compte animer «dans les jours prochains» un point de presse «sur la situation».