Même s’ils effectuaient un léger recul par rapport à l’envolée de la semaine dernière, les cours du pétrole demeuraient bien soutenus, hier, à l’entame d’une nouvelle semaine pour le marché. Des facteurs géostratégiques planaient toujours sur les séances, menaçant l’offre et maintenant les cours à de hauts niveaux.

Par Feriel Nourine
Dans cette tendance, le Brent de la mer du Nord pour livraison en mars évoluait, en fin de matinée, à hauteur de 87,63 dollars le baril, cédant 0,26% par rapport à la clôture de vendredi. De son côté, le West Texas Intermediate (WTI) pour livraison le même mois a baissé de 0,36% à 84,78 dollars.
Les deux références de brut profitent donc de tensions géopolitiques au Moyen-Orient et en Ukraine pour rester dans un élan haussier. « Le sentiment haussier a été soutenu par une série de facteurs », affirme Stephen Brennock, analyste chez PVM Energy, dont « des troubles au Moyen-Orient et un risque d’invasion de l’Ukraine par la Russie qui apparaît de plus en plus probable », cite-t-il. Hier, Londres a annoncé le retrait de personnels de son ambassade à Kiev face à la « menace croissante » de la Russie, après des mesures similaires des Etats-Unis. L’alliance de l’Otan a également annoncé, lundi, avoir placé des forces en attente et envoyé des navires et des avions de combat pour renforcer leur défense en Europe de l’Est face aux activités militaires de la Russie aux frontières de l’Ukraine.
« La situation au Moyen-Orient reste également incertaine », note Carsten Fritsch, analyste pour Commerzbank. Les rebelles au Yémen ont tiré, lundi, coup sur coup des missiles balistiques contre les Emirats arabes unis qui les ont interceptés et l’Arabie saoudite où deux personnes ont été blessées. Ces troubles font planer des risques conséquents sur l’offre de pétrole, la Russie comme les Emirats arabes unis étant des producteurs importants de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses partenaires (Opep+). « Et le cartel élargi a de toute façon du mal à atteindre le niveau de production convenu », ajoute Carsten Fritsch.

Morgan Stanley prévoit un baril à 100 dollars
Après avoir révisé à la baisse ses prévisions sur les prix du brut, fin novembre dernier, Morgan Stanley opère une autre révision et se met à l’heure d’un baril à 100 dollars et plus en 2022, rejoignant les autres établissements bancaires américains sur cette piste. Elle s’attend désormais à ce que les prix atteignent les trois chiffres au second semestre. Le marché pétrolier se dirige vers un « triple déficit » dû à la faiblesse des stocks, des capacités de production inutilisées ainsi que de faibles investissements, a déclaré MS dans une note reprise par Reuters.
La banque s’attend désormais à ce que le pétrole atteigne 100 dollars aux troisième et quatrième trimestres de cette année, relevant ses prévisions pour le troisième et le quatrième trimestre de 90 et 87,50 dollars le baril, respectivement. « Les principaux marchés de produits pétroliers (essence, carburéacteur et gasoil/diesel) affichent tous des marges de crack élevées, une forte déportation et des stocks qui sont tombés à de faibles niveaux. Rien de tout cela ne signale une faiblesse », ont écrit les analystes de Morgan Stanley dans leur note citée par Reuters
Un pétrole à trois chiffres « est en préparation » pour le deuxième trimestre de cette année, a déclaré la semaine dernière à Bloomberg Francisco Blanch, responsable des matières premières mondiales à la Bank of America. La demande se redresse de manière significative, tandis que l’offre de l’Opep+ commencera à se stabiliser dans les deux prochains mois, a déclaré M. Blanch, notant que seuls l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis pourront produire des barils supplémentaires pour alimenter le marché. Les prix du pétrole pourraient atteindre 100 dollars cette année et monter à 105 dollars le baril en 2023, grâce à un « déficit étonnamment important » dû à l’impact plus faible et potentiellement plus bref d’Omicron sur la demande de pétrole, a déclaré Goldman Sachs la semaine dernière. En raison de la substitution du gaz au pétrole, des déceptions de l’offre et d’une demande plus forte que prévu au quatrième trimestre 2021, les stocks de l’OCDE devraient plonger d’ici l’été à leurs plus bas niveaux depuis 2000, notent les analystes de Goldman. De plus, la capacité de réserve de l’Opep+ devrait également baisser à des niveaux historiquement bas d’environ 1,2 million de bpj, a ajouté la même source. JP Morgan, pour sa part, s’attend à ce que la baisse des capacités de réserve de l’Opep+ augmente la prime de risque des prix, et voit le pétrole atteindre 125 dollars le baril cette année et 150 dollars le baril l’année prochaine.