2019, qui s’achève aujourd’hui pour laisser place à 2020, aura été exceptionnelle à tous les niveaux. Théâtre d’un mouvement populaire pour le changement d’ampleur inédite, elle restera pour l’histoire comme l’année de l’affirmation sur la scène politique nationale de la société et de ses ambitions pour une Algérie démocratique et tournée vers l’avenir.

Incontestablement, 2019 aura été une année pas comme les autres pour l’Algérie. Jamais, probablement, dans l’histoire récente du pays une année n’aura été aussi porteuse d’évènements marquants. Une succession de faits qui poinçonnera la vie nationale et maintiendra le pays dans une tension permanente, rythmée par les manifestations hebdomadaires du Hirak, devenues de véritables rendez-vous politiques. Faute de vie partisane. Tout a commencé lorsqu’un certain 22 février, les Algériens, choqués par les perspectives d’un possible cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika, sont sortis en masse dans les rues d’Alger et dans les grandes villes du pays scandant le refus de cette éventualité. Le 2 avril, sous la pression populaire, Abdelaziz Bouteflika démissionne dans des conditions de tension extrême. L’institution militaire se retrouve soudain au-devant de la scène politique pour y jouer un rôle de premier plan. L’annonce des présidentielles pour le 4 juillet ne tiendra pas la route face au refus manifeste de la population. En parallèle, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah insistera sur une sortie de crise dans le cadre stricte de la Constitution. Malgré l’intransigeance du pouvoir, le Hirak populaire ne faiblit pas, les manifestations du vendredi suivies, le mardi, par celles des étudiants, se poursuivent inlassablement, se faisant chaque fois échos. Le pouvoir, qui semble avoir misé sur un essoufflement du mouvement, maintient le cap de l’organisation des présidentielles, le plus vite possible. L’arrestation, le 9 mai, de l’ancien chef des Renseignements Toufik Mediene et du frère du Président, Saïd, ainsi que le coordonnateur à la présidence Athmane Tartag, fait déjà basculer le pays dans une nouvelle dimension. La crise politique arrive à son summum avec un blocage difficile à dépasser. La mise sous mandat de dépôt par la justice militaire de personnalités lourdes constituera à l’évidence une transformation majeure de la crise. Ces affaires de justice, dans le cadre d’une grande opération « mains propres » visant des figures de « l’ancien système », se poursuivront sous l’œil des Algériens mi-consternés mi-amusés.
En pleine crise politique, toujours sans issue, l’Algérie se retrouve avec pas moins d’une dizaine d’ex-ministres mis en détention à la prison d’El-Harrach, deux ex-Premier ministres et l’ex-DGSN. Les deux ex-Premiers ministres Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, les ex-ministres Amara Benyounes, Amar Ghoul, Ould Abbes, Saïd Barkat, Yousef Yousfi, Abdelghani Zaalane et Mohamed El-Ghazi. D’autres ministres sont sous contrôle judiciaires, à l’image de Karim Djoudi, Amar Tou, Mohamed Benmeradi et Tayeb Louh. Ce bouleversement sensationnel de la chronique judiciaire constitue probablement l’évolution la plus marquante de cette année 2019. Fin juillet, l’ancien président de l’APN, Karim Younès, est désigné à la tête d’une instance du dialogue et de médiation, il est chargé d’entamer et d’engager un processus de dialogue dans l’objectif de trouver une solution à la crise. L’élection présidentielle aura finalement bien eu lieu le 12 décembre comme annoncé par Gaïd Salah malgré une tension extrême. Abdelmadjid Tebboune est élu Président au premier tour face à quatre autres candidats, qui auront fait une campagne dans des conditions contraignantes. Le nouveau Président se retrouve face à une mission délicate, mettre en place les assises de la transition. Le 23 décembre, les Algériens sont abasourdis par l’annonce du décès du chef d’état-major Gaïd Salah. Ce dernier était devenu, durant cette année 2019, l’un des personnages clés du pouvoir. Son inhumation, digne d’un chef d’Etat, donnera lieu à des expressions de peine à la mesure du personnage, considéré comme le « sauveur de l’Algérie ». L’année 2019 s’achève ainsi, alors que les observateurs attendent la composante du gouvernement de Abdelaziz Djerrad, nommé récemment par le Président Tebboune. Les Algériens, eux, sont toujours en quête de signes que le plus dur est derrière eux.