Différents points contenus dans l’avant-projet de loi portant régime électoral, notamment ceux ayant suscité le débat auprès de la classe politique ces derniers jours, ont été expliqués, hier, par les membres de la Commission nationale en charge de la rédaction du nouveau texte, à l’occasion d’une journée d’information portant sur la présentation de la nouvelle mouture aux médias.
C’est ainsi que les huit membres de la Commission, dont le président Ahmed Laraba et le porte-parole Walid Laggoune, ont défendu le projet et apporté des éclaircissements notamment sur l’obligation des 4% devant être obtenus par les partis politiques lors des dernières élections (législatives ou locales), la parité hommes/femmes, le financement des campagnes électorales, ainsi que le mode des listes ouvertes.
Outre la présentation générale, le président de la Commission a tenu à noter que pour l’élaboration du projet de la nouvelle mouture, ils se sont basés sur une étude approfondie des deux lois existantes, celles de 2016 et de 2019, et le travail a consisté à les «unifier afin de donner une cohérence au texte» proposé, pour une «meilleure accessibilité et compréhension de la loi».
A propos des 4% exigés dans les précédents scrutins, lors du jeu des questions-réponses avec les médias, les membres de la commission ont d’abord fait remarquer que c’est une condition qui existait déjà, ajoutant que «c’est un sujet soumis à débat». «Il y en a (des partis, ndlr) qui sont d’accord et d’autres non. Le débat reste encore ouvert. Ce n’est qu’un projet de loi et les partis doivent proposer des amendements», ont-ils dit. Ils ont également fait savoir que les 4% ne sont qu’une partie d’un article qui contient des solutions pour les nouveaux partis qui ne remplissent pas cette condition. Il est donc «attendu» par la Commission que les partis auxquels une copie du projet de loi a été envoyée lui soumettent «des propositions pour enrichissement».
«Ne pas confondre parité et égalité»
Pour la parité hommes-femmes, après avoir rappelé que la représentation féminine au sein des assemblées élues a augmenté à 30% après 2012 alors qu’elle ne dépassait pas les 7% avant, la Commission a expliqué que maintenant il est demandé que la parité soit contenue dans les listes soumises au vote, ce qui n’est pas le système des quotas, soulignant que cela n’empêcherait pas le vote de leurs candidatures par les électeurs. «Pourquoi penser que cette mesure n’est pas en faveur des femmes ? Qui vous a dit que les hommes ne voteraient pas pour les femmes ? Y a-t-il des statistiques ? Au contraire, on veut qu’il y ait plus de représentation féminine, les femmes donnent plus. Ou alors n’a-t-on besoin d’elles que pour voter ? Il y a confusion dans la compréhension, il ne faut pas confondre parité et égalité et c’est cela qui va nous éviter la politique des quotas», ont estimé les membres de la Commission, qui disent «comprendre que pour tout nouveau mode, il y a des appréhensions et c’est normal», préconisant de dépasser tout cela.
Ils relèvent que le nouveau texte contient des «réformes importantes» parmi lesquelles, «il convient d’en finir avec les listes fermées et aller vers des listes ouvertes, et de lutter contre le financement de l’argent sale». Pour plus de professionnalisme dans la gestion des APC/APW, le nouveau mode d’élection donne une place à la jeunesse (1/3 des listes), à l’élite universitaire (1/3 des listes), à la femme, car l’électeur doit avoir la latitude de choisir pour qui il va voter parmi les jeunes, les élites et les femmes, a-t-on soutenu. Pour les rédacteurs du projet de loi électorale, il n’y aura «pas de tête de liste mais une liste ouverte car il y a eu des cas où les gens ont payé pour être tête de liste. Et le mode des listes ouvertes «donne en quelque sorte le choix à l’électeur de classer les candidats et non au parti de le faire».
Garde-fous pour lutter contre la corruption
Concernant le volet financement des campagnes, des garde-fous sont prévus et tout don d’un montant dépassant les 1.000 DA devra transiter par voie bancaire, de même qu’il est interdit de recevoir de l’argent d’une personne morale. Pour les candidats jeunes, dont l’âge est déterminé à moins de 35 ans, une prise en charge totale du financement des campagnes est prévue par l’Etat afin de leur éviter d’avoir recours à l’argent sale. C’est ainsi que la lutte contre la corruption est principalement axée sur le financement des campagnes électorales, dont le nouveau texte prévoit la mise en place d’un comité indépendant placé sous tutelle de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE).
Cette dernière, après avoir été intégrée dans le nouveau texte, verra le nombre de ses membres passer à 20 au lieu de 50 actuellement au niveau central, sachant qu’elle a aussi des délégués au niveau des wilayas. La nouvelle mouture «renforce son autonomie financière et détermine ses prérogatives de façon précise étant donné le rôle important qu’elle est appelée à jouer du début à la fin de tout scrutin», a-t-on expliqué.
Il convient de noter que le président de la Commission, Ahmed Laraba, a tenu à souligner que l’objectif visé, à travers la révision de la loi organique portant régime électoral, est de garantir des élections «intègres et transparentes», qu’elles soient présidentielles, législatives ou locales (APC/APW), et que pour son élaboration, des consultations ont été menées avec des cadres du ministère de l’Intérieur et ceux de l’ANIE.
Il a, par ailleurs, indiqué que la mouture de l’avant-projet de la loi électorale contient un total de 313 articles dont 73 nouveaux sur les 188 articles entre nouveaux et amendés. Pour rappel, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, avait procédé, le 19 septembre dernier, à l’installation de cette Commission, laquelle avait remis la première mouture du document aux partis politiques la semaine dernière pour enrichissement et débat.