A l’heure où l’ensemble des prévisionnistes tablent sur une inflation beaucoup plus élevée que celle annoncée en octobre 2021 par la Banque centrale, compte tenu de la combinaison de plusieurs facteurs, le chef de l’Etat est intervenu, dimanche, lors du Conseil des ministres pour esquisser une feuille de route censée faire retomber la fièvre inflationniste et protéger le pouvoir d’achat des Algériens.

Par Hakim Ould Mohamed
Le chef de l’Etat a ainsi ordonné le gel temporaire de tous les impôts et taxes, notamment celles contenues dans la loi de finances 2022 sur certains produits alimentaires. Il a également demandé à son gouvernement de supprimer tous les impôts et taxes sur le e-commerce, les téléphones portables, les matériels informatiques à usage personnel et les startups en se contentant des tarifications réglementées. Le gouvernement a été également instruit à la même occasion à l’effet de prendre toutes les mesures et procédures visant à éviter aux citoyens l’impact de la flambée vertigineuse des prix dans les marchés internationaux durant l’année en cours jusqu’à leur stabilisation. La première parade à effet immédiat à cette flambée des cours mondiaux des produits alimentaires est la mise en place d’un mécanisme compensatoire, à travers lequel l’Etat s’engage à prendre en charge la différence des prix des produits destinés aux citoyens par l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC). Dit autrement, l’OAIC vend des céréales aux minoteries à prix subventionnés afin que les industriels ne répercutent pas la hausse des prix mondiaux sur les prix à la consommation. Il a également demandé le renforcement du contrôle sur les subventions dans le secteur de l’agriculture et de l’élevage de bétail pour une stabilité des prix au service des citoyens.
Ces mesures, saluées par l’ensemble des acteurs politiques et de la société civile, constituent, pour ainsi dire, une démarche inédite dont le but est de stabiliser les prix des produits alimentaires et éviter que les pressions inflationnistes, déjà pesantes, ne viennent rompre l’équilibre éphémère de la trésorerie des petites et moyennes bourses. L’une dans l’autre, ces mesures sont venues – conjoncture oblige – remettre au frigo les arbitrages fiscaux de la loi budgétaire de l’actuel exercice et renvoyer à plus tard les discussions en faveur d’une réforme de la politique sociale de l’Etat dont il était question également dans la loi de finances 2022. Car, faut-il le reconnaître aussi, une révision des subventions pourrait être un facteur favorisant la hausse de l’inflation, étant donné l’effet direct de cette réforme sur le mouvement des prix à la consommation.
L’accélération de l’inflation en 2021, alimentée particulièrement par la hausse des prix des produits alimentaires sur les marchés mondiaux, ne saurait être expliquée exclusivement par les variations des prix à l’international. Car, en toile de fond, figure également une dépréciation ininterrompue du dinar par rapport aux principales devises d’échange. Cette dépréciation à répétition a contribué grandement au renchérissement des coûts de production en interne et de la consommation.
Le ministre des Finances, qui avait présenté le projet de loi de finances 2022 devant la commission des finances, avait été interpellé, rappelons-le, au sujet de la dépréciation continue du dinar et ses conséquences sur le pouvoir d’achat des ménages. C’est un secret de Polichinelle que de dire aussi que la dérégulation des marchés et la prolifération d’autres espaces de vente informels constituent une source alimentant les pressions inflationnistes. L’existence de marchés informels et/ou mal régulés complique la gestion macroéconomique, car ils alimentent les anticipations inflationnistes et faussent la formation des prix.
Ceux-ci alimentent également les phénomènes de thésaurisation et de circulation en grandes quantités de la monnaie fiduciaire hors canal bancaire. Tous ces facteurs participent à un rebond de l’inflation qui ne fait qu’éroder davantage le pouvoir d’achat des Algériens. Ce pourquoi, de nouvelles mesures destinées à lutter contre l’informel et accélérer la bancarisation sont nécessaires, en sus d’un répit dans les opérations d’ajustement du taux de change du dinar.