Les appels au dialogue sont une constante qui est remise sur le tapis à chaque fois que l’occasion s’y prête ces derniers temps, notamment depuis l’élection présidentielle. Le dernier appel en date a été lancé, avant-hier, par le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, au lendemain de la tenue du premier Conseil des ministres. Avant de présenter le plan d’action, actuellement en cours d’élaboration, devant le Parlement et en raison du contexte particulier que connait le pays, «le gouvernement, a déclaré le Premier ministre, entend entamer une nouvelle ère basée sur le dialogue et la concertation». Ce sont «l’ensemble des acteurs politiques, sociaux et économiques qui sont conviés à prendre part au dialogue et à la concertation, lesquels seront menés dans un esprit de participation et de partenariat», a souligné M. Djerad, dans une sorte de tentative de décrispation de la situation sachant qu’une partie de la classe politique maintient sa position d’anti dialogue. L’appel du Premier ministre, dans lequel il a réservé une large part au front social, n’a exclu aucune des parties susceptibles d’être associées au dialogue et d’apporter sa pierre à l’édification d’une nouvelle République. Son appel prend tout son sens quand on sait qu’il fait suite aux discours et directives du Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, qui n’a eu de cesse d’appeler au dialogue. La première fois le jour de l’annonce des résultats des élections, où il avait déclaré tendre la main au Hirak pour le dialogue, la deuxième dans son discours d’investiture où le mot «dialogue» était accompagné de celui de «concertation», et la troisième à l’occasion du premier Conseil des ministres tenu dimanche dernier. «Le Président de la République a instruit les membres du gouvernement d’être à l’écoute des préoccupations et besoins des citoyens en adoptant le dialogue et la concertation, et de veiller scrupuleusement à demeurer au service de l’Etat et du peuple», est-il noté dans le communiqué diffusé à l’issue du Conseil des ministres.
Ces appels au dialogue continuent cependant de ne pas trouver écho auprès de certains partis, notamment ceux du groupe appelé les «Forces de l’Alternative démocratique», composé de sept formations politiques (FFS, RCD, PT, PST, MDS, PLD, UCP) et de la LADDH représentée par Nouredine Benissad, dont le raidissement des positions est acté dans leurs différents communiqués. Ainsi, la classe politique est divisée. S’il y a des partis qui sont favorables au dialogue, d’autres ne le sont pas. Ils restent sceptiques et maintiennent leur position de radicalité. C’est le cas du Mouvement démocratique et social (MDS). Son coordinateur national, Fethi Gherras, rejette catégoriquement l’offre de dialogue. «Notre position est connue. Au MDS, nous avons dit non au dialogue et qu’il faut que la révolution pacifique continue. Il n’y a aucune concession là-dessus», a-t-il soutenu. «C’est notre position avant la mascarade de décembre et après. Pour nous, ce système continue de tourner le dos aux aspirations des Algériens. On ne veut pas de dialogue avec l’autoritarisme. On veut la rupture», a ajouté M. Gherras.
C’est la même position radicale au niveau du Front des forces socialistes (FFS) qui, par la voix de son secrétaire national, Hakim Belahcel, a estimé récemment que «la seule orientation à défendre est celle de rester dans la logique de l’Alternative démocratique lancée l’été dernier» et que «le seul engagement du FFS reste celui qu’il a signé avec les membres du Pacte pour l’Alternative démocratique (PAD)» qui rejette l’offre du dialogue. Pour lui, cette offre «ne répond ni aux standards de transparence ni aux préalables politiques nécessaires pour installer la confiance et la crédibilité dans une telle initiative de sortie de crise». Ces propos de M. Belahcel sont appuyés par le membre de l’instance présidentielle du parti, Ali Laskri, qui a déclaré : «Nous croyons
au FFS qu’il n’y a pas d’autre issue que l’Alternative démocratique pour permettre un changement du système et non un changement dans le système comme tend à le réaliser le pouvoir.»
Pour sa part, la présidente de l’Union pour le changement et le progrès (UCP), Zoubida Assoul, s’est dite favorable à «un dialogue sérieux», mais non sans la satisfaction de certaines conditions, dont «l’instauration d’un climat d’apaisement et l’arrêt des provocations envers les Algériens». Dans un entretien au quotidien El Khabar, elle a affirmé avoir «pris acte de la libération de dizaines de détenus d’opinion» tout en soulignant que «beaucoup d’autres sont encore détenus».
C’est ainsi qu’elle appelle «à l’ouverture du champ politique, au débat public dans les universités et les espaces publics et à l’ouverture du champ médiatique à toutes les voix sans exclusion». Ce sont également des conditions qui permettent, selon elle, d’aller au dialogue.