La Libye tend à devenir un véritable dossier chaud pour les autorités algériennes au vu de l’évolution sur le terrain. L’activité diplomatique récente à Alger en est un des signaux les plus apparents. Le Président de la République Abdelmadjid Tebboune a reçu, hier, le ministre turc des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu où il était évidemment question des derniers développements de la situation en Libye.

Cavusoglu a entamé, lundi, une visite de deux jours qui porte essentiellement sur la crise actuelle en Libye et comment « gérer » de possibles conséquences de l’aggravation de la situation. Des conséquences qui n’épargneront ni les pays du voisinage ni ceux de l’espace méditerranéen et africain. L’Algérie a appelé la communauté internationale et le Conseil de sécurité à « assumer leurs responsabilités pour imposer le respect de la paix et de la sécurité en Libye ». Tebboune avait reçu, lundi, le Président du Conseil présidentiel du Gouvernement d’union nationale (GNA) Fayez El-Serraj. Un entretien durant lequel il a été rappelé « la position constante de l’Algérie vis-à-vis de la crise libyenne »,
« une position qui repose essentiellement sur le principe de non-ingérence dans les affaires internes des Etats ». Alger continue à réaffirmer sa position de principe sur cet épineux dossier libyen, à savoir le refus de l’intervention étrangère. Le Président a rappelé la nécessité « de trouver une solution politique à cette crise qui garantit l’unité de la Libye, de son peuple et de son territoire ainsi que sa souveraineté nationale, loin de toute ingérence étrangère ». Cette position « s’est cristallisée, dès le déclenchement de la crise, par la défense de l’unité territoriale libyenne dans les forums internationaux et à tous les niveaux ». Le chef de l’Etat a rappelé l’attachement « à préserver la région de toute ingérence étrangère, compte tenu des menaces qui pèsent sur les intérêts des peuples de la région, sur l’unité de leurs Etats et sur la sécurité et la paix dans la région et dans le monde ». Et d’ajouter : « L’Algérie appelle également les parties étrangères à cesser d’alimenter cette escalade et d’accorder aux parties belligérantes leur soutien militaire, matériel et humain, et plaide pour le respect de la légalité internationale afin de faciliter la reprise du dialogue pour parvenir à une solution politique à la crise. » Le message à peine voilé semble s’adresser aux multiples acteurs indirects de la crise libyenne. L’Algérie a également dénoncé l’attaque ayant fait près de 30 morts parmi les étudiants de l’Ecole militaire de Tripoli, « un acte criminel, voire un crime de guerre ». Le ministre des Affaire étrangères dira que Tripoli est « une ligne rouge à ne pas franchir ».

L’ire de l’émissaire de l’ONU
L’émissaire de l’ONU pour la Libye, Ghassan Salamé, a affirmé lundi sa
« colère » en réclamant une énième fois l’arrêt des interférences étrangères dans le conflit libyen.
Interrogé sur l’arrivée de militaires turcs en Libye, en soutien au Gouvernement libyen d’union nationale (GNA), Ghassan Salamé a répondu que « le pays souffrait beaucoup trop des interférences étrangères sous différentes formes ». « Ce que je demande à ces pays est très clair : restez hors de Libye ! ». « Il y a assez d’armes en Libye, ils n’ont pas besoin de plus. Il y a assez de mercenaires en Libye, alors arrêtez d’en envoyer comme c’est encore le cas aujourd’hui », a dit l’émissaire, en évoquant l’arrivée dans le pays « de centaines, probablement de milliers » d’entre eux. L’émissaire de l’ONU s’est aussi montré sans concession à l’égard du Conseil de sécurité, incapable de s’entendre depuis avril sur une résolution pour un cessez-le-feu. « La Libye n’est pas seulement une histoire de pétrole, une histoire de gaz, une histoire géopolitique », s’est-il exclamé. « C’est aussi une histoire d’hommes, et la population souffre pour la seule raison qu’il n’y a pas de message international clair affirmant qu’assez, c’est assez ! », a-t-il déploré. Interrogé sur la date d’une conférence internationale sur la Libye, envisagée par l’Allemagne et espérée avant fin janvier, l’émissaire a indiqué la souhaiter « au plus tôt ». En attendant, une rencontre devrait avoir lieu samedi prochain à Moscou entre le président russe Vladimir Poutine et la chancelière allemande Angela Merkel. Une rencontre qui pourrait être décisive pour l’organisation de cette réunion internationale.