L’écrivain britannique Salman Rushdie va mieux et a pu parler, ont affirmé hier dimanche son fils et son agent, deux jours après qu’il eut été poignardé vendredi dernier une dizaine de fois au cou et à l’abdomen par un Américain d’origine libanaise lors d’une conférence dans un centre culturel de Chautauqua dans l’Etat de New York.

Synthèse de Farid Ainouche
Âgé de 75 ans, il n’est plus sous assistance respiratoire et « la voie du rétablissement a commencé », a indiqué son agent Andrew Wylie dans un communiqué transmis au Washington Post. « Les blessures sont graves, mais son état évolue dans la bonne direction », a ajouté ce proche de l’auteur des « Versets sataniques », un livre pour lequel il a été condamné à sa publication, voici plus de trente ans, par une fatwa lancée par Khomeini et appelant à sa mort. Le fils de Salman Rushdie, Zafar Rushdie, a confirmé sur Twitter que son père « avait pu dire quelques mots » samedi et qu’il avait « conservé intact son sens de l’humour ». La famille Rushdie s’est dite « extrêmement soulagée ». L’écrivain britannique naturalisé américain reste hospitalisé depuis vendredi à Erié, en Pennsylvanie, au bord du lac qui sépare les Etats-Unis du Canada. Selon le New York Times samedi soir, citant M. Wylie qui avait été alarmiste vendredi, le romancier, avait recommencé à parler. L’agresseur présumé, Hadi Matar, 24 ans, inculpé de « tentative de meurtre et agression », a comparu samedi soir devant un tribunal de Chautauqua, en tenue rayée noire et blanche de détenu, menotté et masqué et n’a pas dit un mot, selon la presse locale. Les procureurs ont estimé que l’attaque de vendredi était préméditée. Le suspect, qui vit dans le New Jersey, a plaidé « non coupable » par la voix de son avocat et comparaîtra une nouvelle fois le 19 août. L’attentat a provoqué une onde de choc, particulièrement en Occident: le président américain Joe Biden a condamné « une attaque brutale » et rendu hommage à M. Rushdie pour son « refus d’être intimidé et réduit au silence ». Vivant à New York depuis vingt ans, Salman Rushdie avait repris une vie à peu près normale tout en continuant de défendre, dans ses livres, la satire et l’irrévérence. Coïncidence, le magazine allemand Stern l’a interviewé il y a quelques jours, avant l’attaque: « Depuis que je vis aux Etats Unis, je n’ai plus de problème (…) Ma vie est de nouveau normale », assure l’écrivain, dans cet entretien à paraître in extenso le 18 août, en se disant « optimiste » malgré « les menaces de mort quotidiennes ». Salman Rushdie, né en 1947 en Inde dans une famille d’intellectuels musulmans non pratiquants, avait embrasé une partie du monde islamique avec la publication des « Versets sataniques », jugés par les musulmans les plus rigoristes comme blasphématoires. La fatwa lancée l’ayatollah Rouhollah Khomeiny réclamant son assassinat n’a de fait jamais été levée et beaucoup des traducteurs des « Versets » ont été blessés par des attaques, voire tués, comme le Japonais Hitoshi Igarashi, poignardé à mort en 1991.