Les développements récents sur les scènes géopolitique et énergétique mondiales ont montré les atouts dont disposent l’Algérie et sa compagnie des hydrocarbures sur le marché du gaz notamment. Il n’en demeure pas moins que Sonatrach fait face à une rude concurrence des grands acteurs internationaux du secteur. A leur tête, le Qatar et les Etats-Unis. Ces deux poids lourds se positionnent en sérieux compétiteurs à court terme auprès du consommateur européen, un client historique et décisif pour nos recettes en ressources fossiles.

Par Khaled Remouche
En effet, si l’Algérie reste les bras croisés, ses parts sur le marché européen à l’horizon 2026-2027 risquent d’être fortement réduits. Le Qatar et les Etats-Unis seront les principaux concurrents du pays sur ce marché. Ainsi, les manœuvres sont en train de s’accélérer sur le marché international du gaz. Après que la Russie ait coupé ses livraisons de gaz à la Bulgarie, la Pologne et la Finlande et réduit ses exportations de gaz vers l’Allemagne et l’Italie, l’Union européenne est en quête urgente d’alternatives à l’approvisionnement russe en gaz naturel. En un mot, à la recherche de nouveaux fournisseurs pour ne plus dépendre, comme aujourd’hui, du gaz russe.
Les Etats-Unis ont augmenté leurs exportations de GNL vers les pays de l’Union européenne, une décision politique décidée par le Président américain Joe Biden pour faire face à la réduction des livraisons de gaz à l’Europe. Devant cette situation née du conflit russo-ukrainien, le Qatar se positionne à moyen terme comme l’une des plus sérieuses alternatives au gaz russe. En effet, ce pays, l’un des plus gros exportateurs de GNL dans le monde, vise à augmenter sa production de GNL de 60% d’ici 2027. Cela passe essentiellement par le développement du champ gazier NFE (North Field East), considéré comme le plus riche au monde en termes de réserves. Parmi les premières étapes, le Qatar a annoncé dimanche avoir choisi l’ENI comme deuxième partenaire étranger avec une part de 1,3% après le groupe Total (part de 6,25%°) pour développer ce champ off shore, qualifié de plus grand au monde. Les partenaires étrangers auront une part de 25% dans ce gisement.
Le Qatar a signé récemment, rappelons-le, un accord avec l’Espagne pour approvisionner en GNL ce pays à partir de 2026. Dans une moindre mesure, l’Union européenne est en train de se tourner vers l’Egypte et Israël pour s’approvisionner en GNL. En effet, la Présidente de la commission européenne Von Leyden, qui s’est rendue en Egypte et en Israël, a signé un protocole d’accord entre l’UE et ces deux pays en vue de l’approvisionnement de l’Europe en gaz naturel israélien qui sera transformé sous forme de GNL en Egypte et livré en Europe. Cette alternative au gaz russe demandera, selon des spécialistes, d’énormes investissements car il n’existe pas de gazoduc entre l’Europe, l’Egypte et Israël.
Sonatrach face à ce défi de préservation des parts de marché ne devra pas rester les bras croisés. Elle a déjà signé un accord stratégique avec l’ENI qui portera à moyen terme ses livraisons à l’Italie à hauteur de 31 milliards de mètres cubes/an à travers le gazoduc Enrico-Mattei, qui devrait également alimenter d’autres pays européens selon cet arrangement entre les deux parties.

Les atouts de l’Algérie
L’Algérie, dans cette guerre de parts de marché, a des atouts non négligeables contrairement aux principaux concurrents, à savoir deux gazoducs opérationnels qui permettent de livrer du gaz à l’Europe plus rapidement et à moindre coût. Mais elle devra dans cette bataille disposer de volumes de gaz produits plus importants et une capacité de liquéfaction de gaz plus significative. Sonatrach est astreinte, dans la foulée, à accélérer le développement et la mise en service de nouveaux gisements de gaz tel celui de l’Ahnet, d’Isaren.
Pour Ali Hached, l’ex-vice-président chargé de la commercialisation à Sonatrach, il faudra développer et mettre en service quatre gisements de gaz de la taille d’In Salah pour régler cette question de volume. La solution est non seulement d’insuffler une plus grande dynamique à Sonatrach mais, également, selon lui, d’exploiter les ressources hydrocarbures non conventionnelles importantes que recèle l’Algérie : des ressources non négligeables de tight gas notamment dans la zone de Hamra-Rhourde Nouss et de gaz de schiste notamment au sud-ouest et dans le bassin d’Illizi.
L’accélération de l’application de la nouvelle loi sur les hydrocarbures pour développer rapidement de nouveaux gisements fait également partie des chantiers prioritaires tout comme la réhabilitation ou une meilleure maintenance des vieux complexes de liquéfaction d’Arzew GL1 Z et GL 2 Z en vue d’augmenter la production de GNL pour diversifier ses clients. Il convient également d’étudier la possibilité de réaliser de nouvelles installations de production de GNL une fois la question de volume réglée.
Mais il ne faudrait pas faire supporter à Sonatrach tout le fardeau. Si le rythme de croissance de la demande domestique en gaz et produits pétroliers se maintient à la hausse, il est clair que Sonatrach sera freinée dans ses efforts d’exporter de plus grandes quantités de pétrole et de gaz et donc de préserver ses parts de marché. Il est temps en ce sens d’accélérer la réalisation des actions du gouvernement programmées en matière d’économies d’énergie et de développement des énergies renouvelables.

Gazoduc TSGP: M. Arkab prendra part à Abuja à une réunion tripartite Algérie-Niger-Nigéria
Le ministre de l’Energie et des Mines, Mohamed Arkab, effectue aujourd’hui et demain une visite de travail à Abuja (Nigeria), lors de laquelle, il prendra part à la deuxième réunion tripartite Algérie-Niger-Nigéria sur le projet du Gazoduc Transsaharien (TSGP), a indiqué dimanche un communiqué du ministère.
Cette réunion, qui regroupera les ministres en charge de l’Energie des trois pays, s’inscrit dans le cadre de « la reprise des discussions au sujet du projet du Gazoduc Transsaharien (TSGP) », précise le communiqué.
Les ministres examineront « l’état d’avancement des décisions prises lors de la précédente réunion et les prochaines étapes devant aboutir à la réalisation du projet », ajoute le ministère de l’Energie et des Mines.