Après le manque d’oxygène médicinal et des anticoagulants, dont le très demandé Lovenox, une nouvelle crise pointe à l’horizon sur la disponibilité des réactifs nécessaires aux analyses D-dimères, alertent des spécialistes.
Par Siham Bounabi
Des analyses cruciales pour sauver des vies dans le contexte de la 3e vague de la contamination à la Covid-19, en Algérie, dont la virulence du variant Delta engendre des symptômes de plus en plus graves nécessitant des analyses médicales complètes afin de prescrire le protocole thérapeutique le plus efficace pour sauver la vie des malades.
Les premiers à avoir donné l’alerte sont les laboratoires privés qui ont signalé la rupture au niveau de plusieurs centres d’analyses. En effet, le Syndicat algérien des laboratoires d’analyses médicales (Salam) tire la sonnette d’alarme en annonçant une rupture des réactifs de D-dimères dans les laboratoires d’analyses privés à travers le pays. Selon le syndicat, face à la demande croissante, les fournisseurs répliquent que les réactifs sont toujours bloqués à l’international. Certains laboratoires privés continuent, certes, d’effectuer ces analyses en se « débrouillant » avec des anciens stocks, mais ce n’est qu’une question de temps avant que la rupture soit effective sur tout le territoire national. Salam annonce avoir déjà saisi le ministère de l’Industrie pharmaceutique afin que les autorités interviennent au niveau international pour l’acquisition de ces réactifs nécessaires dans le protocole thérapeutique contre la Covid-19 mais, pour le moment, ils sont toujours dans l’attente d’une réponse.
Dans le secteur public, la tension sur les réactifs D-dimères commence également à se faire ressentir, nous a affirmé, hier, Dr Youcef Boudjellal, spécialiste en microbiologie et secrétaire général du Syndicat autonome des biologistes de la santé publique (SABSP). Il confirme également la rupture dans la majorité des laboratoires d’analyses privés, surtout ceux localisés dans les wilayas les plus touchées par la 3e vague du coronavirus qui fait des ravages.
Dr Youcef Boudjellal nous explique que les analyses de D-Dimères sont des examens complémentaires aux tests PCR qui, eux, servent à confirmer seulement si le malade est diagnostiqué positif à la Covid. Une fois le diagnostic confirmé, il est complété par différents bilans, dont le bilan infectieux, FNS et le bilan des D-Dimères.
Scientifiquement parlant, les D-dimères sont des molécules résultant de la destruction de la fibrine, une protéine produite essentiellement lors de la coagulation du sang. La présence de D-dimères dans le sang est normale, mais à taux faible, et son dosage permet en cas d’augmentation importante de détecter la présence d’un caillot de sang ou thrombus. Les D-Dimères sont dosés en cas de suspicion de thrombose veineuse profonde (phlébite) ou d’embolie pulmonaire. Même si les statistiques ne sont pas encore publiées, il y a un fort pourcentage que les patients atteints de la Covid-19 développent des événements cliniques thrombotiques ou des embolies pulmonaires augmentant ainsi le risque de décès au cours de la maladie.
Le secrétaire général du SABSP souligne que la tension actuelle sur les réactifs s’explique notamment par le fait que s’il y a eu une anticipation sur la commande des kits de tests PCR, afin d’assurer leur disponibilité, il n’y a pas eu de commande aussi importante des réactifs qui accompagnent les bilans des personnes atteintes par la Covid et dont le nombre a augmenté à cause des complications inhérentes à la virulence du variant. Il affirme également que cette rupture au niveau des laboratoires privés et la forte demande inhérente aux cas de plus en plus compliqués diagnostiqués ont doublé le prix de ces analyses qui, dans certains laboratoires, sont passés de moins de 2 000 DA à près de 4 000 DA. Selon notre interlocuteur, l’augmentation des analyses D-dimères est imposée par les fournisseurs aux laboratoires privés et impacte directement sur les prix pratiqués dans les laboratoires privés. Face à cette situation, Dr Youcef Boudjellal lance un appel aux pouvoirs publics et, plus spécifiquement, au ministère de l’Industrie pharmaceutique de plafonner un prix fixe comme cela a été fait pour les tests PCR et antigéniques. Il appelle également à la facilitation de l’importation des réactifs nécessaires au bilan des malades Covid, non seulement pour les réactif pour le bilan D-dimères mais, également, des autres réactifs nécessaires dans le protocole Covid afin d’anticiper dès maintenant sur les risques de rupture suite au nombre croissant de demandes de ce type de bilan crucial pour définir le bon traitement à adopter et sauver la vie des malades du coronavirus et qui risquent de décéder faute d’un bon diagnostic. <