Le procès en première instance du journaliste et activiste politique Fodil Boumala s’ouvre aujourd’hui au tribunal de Dar El-Beïda. Poursuivi pour les chefs d’inculpation d’«atteinte à l’intégrité du territoire national» et «atteinte à l’unité nationale», sur la base des articles 79 et 96 du code pénal, Boumala a été placé sous mandat de dépôt à la prison d’El Harrach, le 19 septembre 2019, soit au lendemain de son arrestation. La programmation de ce procès ouvre les portes de l’espoir de voir enfin cet activiste retrouver sa liberté, après qu’un autre militant, en l’occurrence Samir Belarbi, a bénéficié dernièrement de l’acquittement.
Arrêté le 18 septembre, vers 20h30, à proximité de son domicile à la cité Les Bananiers, Bab Ezzouar, par des éléments des services de sécurité, Boumala est considéré parmi les activistes les plus influents au sein du Hirak. Ses interventions sur les réseaux sociaux et en public étaient suivies par un grand nombre de citoyens. L’ancien journaliste de l’ENTV s’était distingué par ses critiques virulentes contre l’ancien régime qu’il ne ménageait pas. « Par notre pacifisme, nous triompherons contre la violence du régime », avait-il déclaré le 14 septembre à Alger, devant un parterre de citoyens, ajoutant « quand bien même ils interpelleront des Tabbou et des Bouregaâ, il y en aura des millions dans la rue ».
Depuis son placement en détention provisoire, ses avocats ont déposé plusieurs demandes de remise en liberté, mais ces dernières ont été refusées. Pour l’un de ses avocats, Maître Abdelghani Badi, l’arrestation de Boumala, comme celle des Tabbou, Benlarbi et Fersaoui, est liée à leurs discours. Ces personnages « ont une présence et une influence considérables avant et pendant le Hirak. Les citoyens les écoutent et leur font confiance », a-t-il expliqué dans une interview accordée ces derniers jours à un confrère. Dénonçant la durée de la détention provisoire, Me Badi estime que les faits pour lesquels sont poursuivis Boumala, Tabbou et Fersaoui « ne devraient pas nécessiter du tout une instruction ». « La règle dans des cas pareils est la comparution immédiate. L’instruction dans ce genre d’affaires a pour objectif de justifier la mise en détention provisoire. Je dois préciser que même les faits ne correspondent en aucun cas aux chefs d’inculpation qui pèsent sur ces détenus », a-t-il ajouté. Le procès de Fodil Boumala intervient, par ailleurs, à quelques jours seulement de l’anniversaire de la révolution du 22 février. Une date phare pour les Algériens qui continuent de se mobiliser chaque vendredi et chaque mardi pour le changement du régime et l’instauration d’une véritable démocratie. Depuis le mois de janvier, une vague de libérations de détenus d’opinion et de l’emblème tamazigh a touché un grand nombre de prisonniers. Le président Abdelmadjid Tebboune qui mène des consultations avec nombre de personnalités et chefs de partis autour des réformes a, à maintes reprises, affiché sa disponibilité à instaurer un climat apaisé. La libération des détenus d’opinion semble être au cœur de cette feuille de route. A signaler enfin que le 12 du mois en cours, la chambre d’accusation près la Cour d’Alger statuera sur l’appel du procureur du tribunal de Sidi M’hamed concernant l’affaire Karim Tabbou. Le 26 janvier dernier, le juge d’instruction de la 10e chambre du même tribunal avait renvoyé le dossier du coordinateur de l’UDS, non agréé, en correctionnel, mais le procureur en a immédiatement fait appel. Le renvoi du dossier en correctionnel signifie que le procès sera programmé le plus tôt possible et que l’accusé va être jugé et peut même être libéré, expliquent des avocats.n