La décrispation et le dégel dans les relations algéro-françaises ont accompli un nouveau pas à travers l’entretien téléphonique qu’ont eu, hier, les deux chefs d’Etat, Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron.PAR NAZIM BRAHIMI
Les deux présidents renouent ainsi contact dans ce qui s’apparente à bien des égards à un retour aux bons comptes, après plusieurs mois de rupture et de froid provoqués par les propos jugés «irresponsables» du président français Emmanuel Macron sur l’Algérie et son histoire.
Ce retour à la «normalité» a été par ailleurs précédé par des actions diplomatiques allant dans le sens de rétablir un climat de confiance entre les deux pays. Il s’agit notamment du retour à son poste, début janvier, de l’ambassadeur d’Algérie à Paris, Mohamed Antar Daoud, rappelé par Alger, le 2 octobre, suite aux propos de Macron. Cette étape a été, faut-il le rappeler, précédée par la visite effectuée en Algérie, le 9 décembre dernier, par le chef de la diplomatie française. L’escale de Jean Yves Le Drian à Alger aura été un marqueur de cette séquence de rétablissement des échanges entre les deux pays.
«Nous souhaitons que le dialogue, que nous relançons aujourd’hui, puisse conduire à une reprise des échanges politiques entre nos deux gouvernements en 2022, au-delà des blessures du passé que nous devons regarder en face au regard des malentendus qu’il nous revient de dépasser», avait déclaré le ministre français des Affaires étrangères et de l’Europe à la presse après son audience par le président Tebboune. Affirmant que l’Algérie était «un partenaire essentiel pour la France sur le plan bilatéral, mais, également, sur le plan régional», Jean-Yves Le Drian avait soutenu que Paris et Alger «font face ensemble à des défis majeurs dans un environnement régional et international incertain». «Nous devons être en mesure de proposer des réponses opérationnelles aux défis que représentent le terrorisme dans la région sahélienne, mais aussi l’émigration clandestine, ainsi qu’aux enjeux de développement économique. Sur tous ces sujets, et parce que nos intérêts sont communs, notre concertation est primordiale et c’était le sens de ma présence aujourd’hui à Alger», a-t-il souligné.
A l’évidence, aussi bien la visite de Le Drian à Alger que la reprise de fonction de l’ambassadeur d’Algérie à Paris sont intervenus dans un contexte politique crucial et à un moment où la France préside l’Union européenne depuis janvier 2022 et pendant six mois. Une période où il est indiqué pour le représentant de l’Algérie en France d’être à son poste tant les questions européennes sont aussi au cœur des priorités de l’Algérie qui cherche à renégocier l’accord d’association avec l’UE et entend également faire entendre sa voix au prochain sommet Afrique-UE, qui se tiendra les 17 et 18 février prochain dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne.
D’ailleurs, le sommet Afrique-Union européenne a été évoqué par MM. Tebboune et Macron dans leur entretien téléphonique d’hier, selon le communiqué de la Présidence. Cette dernière a indiqué que le président français a renouvelé son invitation au Président Tebboune pour prendre part au Sommet Europe-Afrique prévu à Bruxelles dans une vingtaine de jours. Dans le registre de la coopération bilatérale, les deux présidents ont évoqué, durant cette communication, «les perspectives de la tenue du Comité intergouvernemental de haut niveau (CIHN)», a conclu le communiqué de la Présidence de la République.
Ce rendez-vous, qui se déroulera à Alger, sera, selon toute vraisemblance, une étape pour évaluer une coopération en dents de scie selon le moment et les intérêts qui leur sont respectifs. On peut citer également le dossier des visas et de la circulation des personnes, celui de l’économie et des échanges commerciaux comme on peut lui rajouter ceux en relation avec les géopolitiques du Maghreb et du Sahel qui connaissent d’importants bouleversements.
A noter que l’Ambassadeur Mohamed-Antar Daoud a été reçu successivement, jeudi 13 janvier 2022, par le Secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler, et la Directrice Afrique du Nord et Moyen-Orient, au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères Mme Anne Gueguen.
Lors de sa rencontre avec la Directrice Afrique du Nord et Moyen-Orient au MEAE, le diplomate algérien «a notifié à la partie française l’accord des autorités algériennes pour la tenue, à Alger, le 31 janvier 2022, des Consultations politiques au niveau des Secrétaires généraux des ministères des Affaires étrangères», selon un communiqué de l’Ambassade d’Algérie en France. Les deux parties ont largement évoqué la question de la tenue, à Alger, de la 5e session du Comité intergouvernemental de haut niveau (CIHN), conclut le même communiqué.