Les relations algéro-françaises tendent à tourner la page des turbulences vécues ces derniers mois et retrouver la sérénité diplomatique. C’est ce que donne à lire les mots du président Abdelmadjid Tebboune, lors de son entrevue avec deux représentants de la presse nationale, affirmant qu’il y a bel et bien un «dégel» dans les relations diplomatiques entre Alger et Paris.
PAR NAZIM BRAHIMI
«Oui, il y a dégel dans les relations avec la France», a souligné M. Tebboune, qui a mis l’accent sur la nécessité d’une «entente» basée sur le respect mutuel, précisant qu’il ne pouvait pas «en dire plus» à ce sujet «pour ne pas influencer le scrutin présidentiel français» prévu au mois d’avril prochain.
«De manière générale, les choses se sont tassées», a indiqué le chef de l’Etat qui s’est appuyé sur les résultats «très positifs» qui ont couronné la récente réunion tenue à Alger, entre une délégation française conduite par le Secrétaire général du ministère des Affaires étrangères et une délégation algérienne conduite également par le Secrétaire général du ministère des Affaires étrangères.
M. Tebboune a ajouté, dans ce sens, que «les choses commencent à prendre une autre direction», citant «le geste» d’Emmanuel Macron qui a rendu hommage aux victimes des manifestations pour la paix et contre l’OAS en Algérie, le 8 février 1962, «réprimées dans le sang à la station de métro Charonne à Paris, par le préfet de police, le scélérat Maurice Papon».
En effet, le 8 février, M. Macron a rendu hommage aux victimes mortes au métro Charonne, à Paris, lors d’une manifestation pour la paix en Algérie le 8 février 1962, violemment réprimée par la police française. A l’évidence, la tonalité utilisée par Tebboune confirme la disponibilité des deux parties à trouver les meilleures conditions pour une coopération à la hauteur des potentialités de partenariat entre les deux pays épisodiquement empoisonnés par «la guerre mémorielle».
Cette tonalité est manifestement en phase avec les déclarations officielles et autres gestes de part et d’autre allant dans le sens de l’accalmie.
Parmi ces indices d’apaisement, nous pouvons citer les récentes déclarations, début février, du ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra, qui a déclaré à des médias français que les relations entre les deux pays sont «dans une phase ascendante». Le chef de la diplomatie a assuré que les présidents Tebboune et Macron avaient «une excellente relation personnelle, cordiale et confiante».
Auparavant, soit le 29 janvier dernier, les deux présidents ont eu une communication téléphonique qui a marqué la décrispation au plus haut niveau de la décision, après plusieurs mois de rupture et de froid provoqués par les propos jugés «irresponsables» du président français sur l’Algérie et son histoire.
Début janvier, l’ambassadeur d’Algérie à Paris, Mohamed Antar Daoud, rappelé par Alger, le 2 octobre, suite aux propos de Macron, a repris ses fonctions diplomatiques, une étape qui a été précédée par la visite effectuée en Algérie, le 9 décembre dernier, par le chef de la diplomatie française. L’escale de Jean Yves Le Drian à Alger aura été un marqueur de cette séquence de rétablissement des échanges entre les deux pays.
Les choses se sont «aggravées davantage» avec le Maroc
Contrairement au «réchauffement» qui marque désormais les relations diplomatiques algéro-françaises, entre Alger et Rabat, les choses se sont «davantage aggravées», a affirmé le président Tebboune. Pour ce dernier, «les choses avec le Maroc n’ont pas changé depuis le début de la crise. Pis, elles se sont aggravées», relevant que Rabat, soutenu par l’entité sioniste, se sert d’un appareil de propagande et de fake-news contre l’Algérie.
«Actuellement, le Maroc s’appuie sur la propagande et les fake-news avec le soutien d’Israël», a-t-il dit, soulignant que le citoyen algérien est conscient que «tout ce qui porte atteinte à l’unité nationale et tente d’attaquer l’Armée et tout ce qui vise à inventer des problèmes entre le Président et l’Armée (…) viennent de l’appareil de propagande mobilisé par le voisin contre l’Algérie, et soutenu par Israël».
Les relations diplomatiques entre Alger et Rabat, qui évoluaient depuis plusieurs années, voire des décennies, sous le signe du contentieux froid et des tensions permanentes, ont été rompues, faut-il le rappeler, le 24 août dernier.
M. Lamamra a considéré, lors de son annonce de la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays, que le Maroc «a fait de son territoire une plateforme permettant à des puissances étrangères de tenir des propos hostiles à l’Algérie», allusion aux propos hostiles tenus, à Rabat, par le ministre israélien des Affaires étrangères sur l’Algérie.
Le dernier Sommet de l’Union Africaine (UA), réuni les 6 et 7 février à Addis Abeba, a été aussi marqué par l’enjeu d’accorder à Israël le statut d’observateur.
Le Sommet a suspendu finalement la décision du président de la Commission africaine, Moussa Faki, d’accorder à l’entité sioniste le statut d’observateur et met en place un comité de sept Chefs d’Etat comprenant l’Algérie pour formuler une recommandation au Sommet de l’UA sur cette question. n