Dès aujourd’hui lundi, le ministère de l’Industrie pharmaceutique durcit le ton contre les pratiques illégales de certains opérateurs du secteur du médicament à travers le renforcement d’un vaste programme d’inspections de brigades mixtes «pour s’assurer de la disponibilité continue des médicaments utilisés dans le protocole thérapeutique anti-Covid-19», annonce un communiqué du ministère parvenu à la Rédaction.Par Sihem Bounabi
La même source précise que ce renforcement se traduira par «l’intervention des brigades d’inspection mixtes ministère du Commerce-ministère de l’Industrie pharmaceutique, installées le jeudi 20 janvier 2022 au ministère du Commerce». Ainsi, ces brigades mixtes ont pour mission de lutter contre «toutes pratiques commerciales susceptibles d’entraîner des tensions ou des ruptures d’approvisionnement de certains médicaments, telles les pratiques de rétentions, de ventes concomitantes, de ventes dites par packs, et qui exposeraient les contrevenants à des sanctions administratives, financières et pénales conformément à la législation en vigueur».
Le ministère de l’Industrie pharmaceutique rappelle qu’une boîte e-mail requetemedic@miph.gov.dz est mise à la disposition des pharmaciens d’officine, victimes de ces pratiques commerciales illégales. Les appelant également à porter directement leurs réclamations à la connaissance des services de l’Inspection générale relevant du ministère de l’Industrie pharmaceutique. Il est précisé à ce sujet que des équipes d’inspecteurs, relevant de cette Inspection générale, ont diligenté, du 23 au 27 janvier dernier, 16 opérations d’inspection au centre et à l’est du pays, ayant permis le constat de la rétention de 16 000 boîtes d’Enoxaparine et 250 000 boîtes de Paracétamol, pour lesquelles 15 mises en demeure ont été prononcées. Selon le constat établi par les inspections, menées jeudi dernier, des fermetures d’établissements pharmaceutiques de distribution devaient être notifiées hier dimanche. Il est également précisé que «toutes ces quantités ont été ventilées vers les pharmacies, 48 heures après les mises en demeure».
Messaoud Belambri, président du Syndicat national algérien des pharmaciens d’officine, nous a affirmé à ce sujet que «les opérations d’inspections, enclenchées la semaine passée, ont permis de libérer les stocks dans les 48 heures», précisant que «le résultat est que la situation s’est traduite sur le terrain presque de manière immédiate. Depuis mercredi dernier, des pharmaciens à travers plusieurs wilayas du pays nous ont informés qu’ils ont commencé déjà à recevoir beaucoup de produits qui étaient sous tension ou en rupture». Il tient à préciser qu’«en tant que syndicat, notre but ce n’est pas que le distributeur soit sanctionné mais que les produits et stocks de médicaments soient disponibles», enchaînant qu’«il y a beaucoup de distributeurs qui travaillent de manière professionnelle, mais il y a également d’autres distributeurs qui, par leurs pratiques, déstabilisent le marché et provoquent des ruptures de médicaments».
Le président du Snapo tient à rappeler que «cela fait longtemps qu’on a demandé qu’il y ait un suivi et des contrôles réguliers dans le secteur de la distribution, parce que nous recevons toujours des requêtes ou des plaintes de pharmaciens par rapport à ces pratiques illégales».
Il souligne à ce sujet que depuis la troisième vague de la Covid, soit depuis août et septembre, des instructions avaient été données par le ministère de l’Industrie pharmaceutique pour la libération des stocks, confiant qu’il y a, certes, toujours eu des stocks de sécurité au niveau de la production de l’importateur et du distributeur mais, justement, ces stocks de sécurité doivent gérer les périodes de crise, et nous sommes en pleine crise sanitaire».
Appel à des contrôles réguliers
Messaoud Belambri se désole que malgré ces instructions, «beaucoup n’ont pas libéré les stocks et, en plus, il y avait toujours des pharmaciens qui nous signalent les pratiques de ventes concomitantes, les packs… C’est pour cela que nous avons, encore une fois, réagi, il y a une dizaine de jour lors de la dernière réunion de l’Observatoire, sachant que chaque fois on transmettait les plaintes des pharmaciens au ministère de l’Industrie pharmaceutique, à l’Observatoire et à l’Inspection générale du ministère de l’industrie pharmaceutique». Dans ce sillage, le président du Snapo lance un appel au ministère de l’Industrie pharmaceutique pour maintenir ces opérations de contrôle et de suivi des programmes d’importation, du respect des programmes de production. «Il faudrait que cela devienne une routine d’assurer des contrôles réguliers et de manière pérenne au niveau de la distribution des médicaments, afin d’assurer le fonctionnement correct et professionnel du secteur». Cela permet aussi «d’assurer un approvisionnement régulier des officines et de lutter contre toutes ces pratiques qui perturbent le marché du médicament se traduisant par des pénuries, des tensions et des distributions inéquitables». Il conclut en estimant qu’«il faut en finir avec cette notion de médicament à caractère commercial. Le médicament est un produit de santé et les pharmaciens devraient être approvisionnés de manière régulière et disposer de toute la nomenclature des médicaments pour les mettre à la disposition des malades à travers tout le territoire national».
Le président du Snapo insiste sur ce point, en soulignant : «Il n’y a pas lieu que des pratiques purement commerciales sévissent dans le secteur du médicament. Nous avons toujours appelé à ce que la déontologie, l’humanisme et le professionnalisme priment sur l’esprit commercial et lucratif.» <