Le Tribunal de Sidi M’hamed a prononcé, hier, une peine de cinq ans de prison ferme assortie d’une amende de 2 millions de dinars, dont 1 million pour le Trésor public, contre les anciens Premiers ministres Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, poursuivis pour octroi d’indus privilèges aux frères Benhamadi, propriétaires du Groupe Condor, spécialisé dans l’électroménager.

La condamnation a été prononcée, deux semaines après l’ouverture du procès dans lequel Ouyahia et Sellal sont accusés d’octroi de privilèges injustifiés aux propriétaires du Groupe Condor et ses filiales, notamment des facilitations pour la réalisation d’une usine de fabrication de médicaments GP Pharma à Sidi Abdallah (Alger), laquelle était gérée par l’ancien ministre de la Poste et des Technologies, Moussa Benhamadi, décédé en juillet dernier à la prison d’El Harrach, des suites de la Covid-19.
Sont également retenus contre les deux anciens Premiers ministres, «les facilitations illégales accordées au Groupe Condor pour la réalisation d’un centre dédié aux brûlés à Skikda par la société Travocovia, une des filiales du même groupe, en plus de l’abus de fonction lors de la conclusion de marchés avec l’opérateur public de téléphonie mobile Mobilis pour l’acquisition de téléphones portables et tablettes auprès du groupe Condor».
A l’ouverture du procès, faut-il le souligner, les deux anciens Premiers ministres ont rejeté les accusations, estimant que leur responsabilité n’est pas engagée dans cette affaire, pointant du doigt celle de l’ancien wali d’Alger, Abdelkader Zoukh, et la direction de l’Agence nationale pour le développement de l’investissement (Andi). Dans sa réponse au juge, Sellal a déclaré que cette société a conclu son contrat de concession et a obtenu un espace pour la réalisation d’une unité d’industrie pharmaceutique dans la nouvelle ville de Sidi Abdallah, alors qu’il n’était pas encore à la tête du gouvernement. Il a ajouté qu’un «Premier ministre, même s’il préside le Conseil national d’investissement (CNI), n’a pas les prérogatives d’octroi, de contrôle ou de suivi d’un projet d’investissement», expliquant que cela «relevait des prérogatives et de la responsabilité de l’Andi et de la partie ayant octroyé le contrat de concession». Pour lui, c’est davantage la responsabilité du wali d’Alger qui est engagée et non celle du chef de l’Exécutif.
La même logique a structuré la parole d’Ahmed Ouyahia, qui est intervenu à partir de son lieu d’incarcération à Abadla (Béchar), estimant que «ces questions concernent directement les collectivités locales, à leur tête la wilaya, et non pas la Chefferie du gouvernement». Ouyahia a ajouté que «le non-respect d’un cahier des charges relève des responsabilités de l’autorité ayant signé l’octroi de la concession foncière et non du chef du gouvernement». Il convient de souligner que le procès devait se dérouler le 9 novembre, mais il a été reporté à la demande de la défense du Trésor public pour l’examen du dossier et du juge d’audience en raison de l’absence de plusieurs témoins principaux, notamment l’ancien wali d’Alger, Abdelkader Zoukh, l’ancienne ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication, Houda Faraoun, et l’ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, Mohamed Hattab.
Après avoir été entamée par le Tribunal d’Alger, l’instruction a été transférée au pôle pénal financier, en charge de toutes les affaires de corruption qui étaient pendantes devant la Cour suprême et le Tribunal de Sidi M’hamed, à Alger. n