Par Nadir Kadi
Le verdict dans le procès pour «corruption» de l’ancien ministre de l’Industrie Youcef Yousfi devait être prononcé le 3 janvier prochain, ont fait savoir, hier, les juges à l’issue de trois jours d’audience. L’ex-responsable qui se serait rendu coupable au cours de son mandat, entre août 2017 et avril 2019, «d’abus de fonction» de «dilapidation de deniers publics» ainsi que «d’octrois d’indus avantages», comparaît en ce sens, depuis lundi, au niveau du Pôle pénal, économique et financier du Tribunal de Sidi M’hamed. Il a répondu aux questions sur ses présumés «liens» avec les frères Kharbouche, investisseurs et hommes d’affaires, qui auraient bénéficié d’avantages injustifiés dans un projet de montage de tracteurs agricoles. L’accusation, par la voix du procureur de la République, a demandé, mardi, pas moins de cinq ans de prison ferme, un million de dinars d’amende et cinq ans d’inéligibilité contre l’ex-ministre.
Les quatre frères Kharbouche, ainsi qu’une vingtaine de co-accusés, dont des ex-cadres des ministères de l’Industrie, de l’Agriculture ou encore des anciens responsables de banque, ont tous fait valoir leur bonne foi… La défense du principal accusé, Youcef Yousfi, est restée, hier encore au moment des plaidoiries, sur une même ligne de défense, invoquant «l’innocence totale». Ainsi l’ex-ministre explique qu’il «n’a rien à voir dans cette affaire», tenant notamment pour preuve, selon ses avocats, que le niveau des attributions du ministre ne lui permettait pas de «donner» ou de retirer des avantages à un projet. Ces derniers restant du ressort du CNI (Conseil national pour l’investissement). Une défense qui pointe en ce sens une éventuelle responsabilité du Premier ministère, occupé à l’époque par Ahmed Ouyahia. Par ailleurs, il est également précisé que des correspondances ont bien existé entre le Premier ministère et le secteur de l’Industrie au sujet de projet «Agro-Industrie» des frères Kharbouche, mais ce courrier n’aurait eu qu’un caractère routinier et ne préfigure pas un accord ou une autorisation particulière.
Pour rappel, la justice avait mis en avant plusieurs irrégularités apparentes qui auraient dû, selon elle, retarder l’étude, voire écarter, le projet des frères Kharbouche. Ainsi on apprenait au premier jour du procès que l’entreprise des investisseurs n’aurait pas été agréée pour ce type d’activité de montage mécanique et n’avait «aucun» contrat ou contact en cours avec un partenaire étranger spécialiste en la matière. Par ailleurs, les questions du juge et du procureur de la République ont laissé entendre que le dossier comportait de lourdes irrégularités, notamment une ambiguïté sur le nom de l’entreprise, différent, sur le dossier d’investissement et sur l’autorisation de construire. Même chose en ce qui concerne un décalage entre les sommes engagées pour l’investissement et les montants des prêts bancaires.
Par ailleurs, il est à préciser que Youcef Yousfi a comparu dans cette affaire depuis le box des accusés, étant toujours sous le coup de précédentes condamnations : cinq ans d’emprisonnement dans le cadre du procès de la politique des usines de montage automobile et de deux ans dans l’affaire Tahkout.