Par Bouzid Chalabi
Certes, ce n’est qu’un projet de loi mais, de toute évidence, le plafonnement de la marge bénéficiaire des commerçants a suscité un accueil contrasté chez les opérateurs du secteur. L’hypothèse tient la route pour l’UGCAA mais pas pour l’ANCA.
Pour le porte-parole de l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) Islam Badrissi, «une telle décision relève avant tout d’une profonde connaissance du marché national». En effet, ce dernier qui se prononçait tout récemment sur le plateau d’une télévision privée, a expliqué «de nombreux facteurs entrent dans le calcul de la marge bénéficiaire des commerçants en Algérie, tout en précisant dans la foulée, la marge dépend principalement des activités commerciales et de la région dans laquelle exerce le commerçant».
A propos des déclarations du ministre de l’Agriculture et du Développement rural sur le plafonnement de la marge bénéficiaire, Islam Badrissi regrette que «le ministre n’a pas consulté les principaux concernés pourr un tel dispositif». C’est pourquoi, le porte-parole a suggéré aux ministres du Commerce et de l’Agriculture de revoir leurs décisions. «Je les invite donc à se rapprocher des commerçants, et ce, avant l’adoption par les deux chambres du dit projet de loi». Toujours dans ce même sillage, le président de l’Association nationale des commerçants algériens (ANCA), Hadj Tahar Boulanouar, interpellé sur le sujet, n’a pas mâché ses mots. Lâchant tout de go «la mise en œuvre de la décision de fixer la marge bénéficiaire des commerçants à 20 % en Algérie est impossible par l’existence d’un imposant marché parallèle qui empêcherait l’application du plafonnement de la marge bénéficiaire à 20%».
Cela dit, il n’en fallait pas tant au ministre du Commerce et de la Promotion des exportations, Kamel Rezig, de réagir aux approches de l’UGCAA et de l’ANCA. Affirmant de son côté, lors de son passage jeudi dernier sur les ondes de la Radio nationale, que «la législation permet de plafonner les marges bénéficiaires en vue de préserver le pouvoir d’achat du citoyen tout en prenant en considération les intérêts des commerçants». Comme il a tenu à préciser à cette occasion que son département «va s’atteler, à travers ce projet de loi, au pré plafonnement des marges bénéficiaires et pas les bénéfices», rappelant que cette mesure s’inscrit dans le cadre de la lutte contre la spéculation illicite, le monopole et la flambée des prix.»Sur ce dernier point, Kamel Rezig a porté à la connaissance des auditeurs que «les opérations de contrôle menées par ses services ont révélé des pratiques auxquelles s’adonnent certains commerçants leur permettant de réaliser des marges de bénéfices très élevées, atteignant 100%, voire même dans certains cas, 200%». Il a enfin souligné que les nouveaux textes de loi visent à «obliger les commerçants et les agriculteurs à vendre leurs produits avec des marges raisonnables prenant en ligne de compte leurs intérêts commerciaux et le pouvoir d’achat des citoyens».
Notons enfin que le ministre du Commerce a mis à profit son passage à la radio pour apporter quelques éléments d’information sur la tension actuelle de l’huile de table. Kamel Rezig a, en effet, assuré que les capacités de production nationale de ce produit ont doublé. Pour preuve, «la production mensuelle dépasse 48 millions de tonnes, ce qui permet de satisfaire la demande sur le marché», a-t-il confié. Toutefois, il a appelé les consommateurs à «ne pas se laisser entraîner par les rumeurs circulant autour de la pénurie de ce produit». En tout cas, la rumeur s’est confirmée ces derniers jours puisque l’huile de table a complètement disparu des étals du commerce du détail. Une situation qui mérite des explications aux yeux des consommateurs car il leur est difficile d’admettre que la production nationale a doublé alors, qu’en parallèle, l’huile est devenue une denrée rare.