L’heure est à la relance de l’investissement, notamment étranger, avec comme amorce, des engagements enregistrés de près de 6 milliards de dollars d’investissements d’Oxy, d’ENI, de Total et de Sinopec. D’autant que le potentiel national en ressources hydrocarbures, considéré comme très important, reste inexploité.
Par Khaled Remouche
La célébration demain du 51e anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures, décidée un 24 février 1971, constitue une excellente opportunité pour mesurer le chemin parcouru et tirer les leçons d’un demi-siècle d’expérience en matière d’exploration et de développement des ressources hydrocarbures.
Dans cette longue marche, marquée par le succès du processus de récupération de nos richesses pétrolières et gazières, par la mise en place d’une industrie pétrolière nationale et un positionnement parmi les grandes compagnies pétrolières dans le monde, il convient de noter aussi la transformation de Sonatrach en un groupe intégré d’amont en aval. La compagnie pétrolière nationale a réussi, en ces cinq décennies, à remplir ses missions : garantir l’approvisionnement énergétique du pays et assurer les recettes en devises, nécessaires au financement de l’économie nationale. Il lui est toujours assigné les objectifs de préserver l’indépendance énergétique à long terme du pays et de contribuer au financement de l’économie nationale.
Paradoxalement, Sonatrach, après tous ces efforts, se trouve aujourd’hui confrontée à des défis aussi importants que lorsqu’il s’agissait pour les jeunes cadres de Sonatrach de relever le challenge après le départ des compagnies françaises et de reprendre en main, seuls, l’exploration et la production d’hydrocarbures. Sonatrach fait face, aujourd’hui, d’abord à une baisse de production et des exportations en raison d’un déclin de production de ses anciens champs de pétrole et de gaz, d’une diminution de sa capacité d’exportation de GNL et d’un reflux de ses investissements et ceux étrangers.
Il faut savoir que durant la première décennie 2000, Sonatrach parvenait à exporter 65 milliards de mètres cubes de gaz contre 54 à 56 milliards de mètres cubes aujourd’hui, à produire 1,4 million de barils/jour de pétrole brut contre 1 million de barils actuellement. Sonatrach investissait entre 50 à 80 milliards dans ses plans quinquennaux de développement, elle prévoit une enveloppe de 40 milliards de dollars pour la période 2023-2026. Elle produisait, en 2009, 225 millions de tonnes équivalent pétrole contre 180 millions de tonnes équivalent pétrole en 2021.
Cependant, comme par le passé, les perspectives de développement de ses ressources pétrolières et gazières restent importantes avec cette particularité qu’aujourd’hui, les ressources emmagasinées dans le sous-sol algérien restent de manière générale plus difficiles à exploiter. A noter que l’Algérie n’a pas exploité tout son potentiel en ressources, qu’il s’agisse de ressources non conventionnelles, celles à partir du forage ultra profond, offshores ou celles via des travaux d’amélioration des taux de récupération des gisements de pétrole. L’application de la nouvelle loi sur les hydrocarbures, comme celle de 1986, augure une relance du partenariat avec les compagnies étrangères qui fait toujours partie d’un axe stratégique de sa politique de développement.
Les accords de Sonatrach, signés en 2022 dans ce cadre avec les compagnies Oxy, ENI, Total et Sinopec, portent sur près de 6 milliards de dollars d’investissements. D’autres accords du genre sont prévus en 2023. Alors que le nouvel appel d’offres, qui sera lancé l’année en cours, augure à moyen terme la relance des investissements étrangers dans le domaine de l’exploration et le développement de gisements. Le contexte géopolitique, lui, est favorable. La guerre Russie-Ukraine replace l’Algérie dans la course pour la consolidation et l’accroissement de ses parts de marché sur le continent européen à travers la réalisation du gazoduc Galsi, la réhabilitation de ses deux complexes de liquéfaction d’Arzew et l’optimisation des nouveaux trains de GNL d’Arzew et de Skikda. Mais là, Sonatrach est appelée à de grands efforts pour augmenter la production, non seulement pour accroître ses exportations de gaz, mais également pour couvrir la demande domestique qui est en forte hausse.
Enfin, reprenons ici en cet anniversaire, la conclusion de Nordine Aït Laoussine, ex-ministre de l’Energie et consultant pétrolier international : «L’Algérie a atteint deux objectifs sur trois des nationalisations des hydrocarbures ; la récupération de ses richesses hydrocarbures et le financement de l’économie par les recettes en devises tirées des exportations d’hydrocarbures. Elle n’a pas réussi pour autant à atteindre le troisième, à savoir diversifier son économie avec le produit en devises des exportations d’hydrocarbures.» n