Le processus de révision constitutionnelle, premier rendez-vous politique de l’ère Tebboune, a pris fin hier avec la proclamation des résultats par l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE), dans lesquels on retient principalement le taux faible de participation estimé à 23,72 % dans lequel c’est le «oui» approbateur qui l’a emporté avec 66, 80 % contre 33, 20 % des suffrages qui ont dit «non» à l’amendement proposé.

Les chiffres communiqués par l’ANIE sont manifestement riches en enseignement sur une révision constitutionnelle, projet engagé par M. Tebboune dès sa prise de fonction présidentielle. Il a dominé, depuis plusieurs mois, le discours officiel en dépit d’un contexte d’urgence sanitaire, jusqu’à en faire une priorité autour de laquelle devrait être bâti le changement promis en rupture avec les anciennes pratiques du pouvoir.
Il est vrai que l’Algérien vote de moins en moins, une tendance qui s’est fortement renforcée depuis la dynamique populaire pour le changement, mais un taux de participation au-dessous de 25% peut être lu comme l’échec du gouvernement qui, en dépit de son engagement physique et de la forte mobilisation de ses membres, notamment durant la troisième et dernière semaine de la campagne référendaire, n’a pas pesé sur l’évènement.
Cette mobilisation de l’Exécutif Djerad, si elle traduisait le souci de parvenir à une large participation à ce référendum, telle que souhaitée par le premier magistrat du pays, qui misait sur un «plébiscite» du projet de révision constitutionnelle, a révélé de sérieuses difficultés du gouvernement à gagner l’adhésion des populations. Ce qui ne pose pas moins, au-delà du fait que ce taux de participation s’apparente à une contrariété de la feuille de route officielle, des questions sur le devenir de l’esquisse d’agenda des échéances prévues juste après le référendum populaire.
Dans une entrevue avec des médias, en septembre dernier, M. Tebboune a fait part de son «souhait» de voir les citoyens «plébisciter le projet de révision constitutionnelle pour qu’on puisse passer directement à la révision de la loi portant régime électoral, laquelle sera soumise au Parlement pour donner naissance, si possible, à de nouvelles institutions élues avant la fin de l’année».

Echec des appareils politiques
Le taux de participation à ce référendum a été révélateur aussi de l’échec des appareils politiques, notamment les traditionnels appuis politiques comme le FLN, le RND, TAJ, dont l’implication dans cette échéance référendaire s’est révélée contre-productive pour les parties et départements chargés de promouvoir le projet de révision constitutionnelle. Les avis entendus durant la campagne, et qui désapprouvent toute utilité politique de formations apparentées à l’ancien régime dans une promesse des ruptures, ont été traduits par les chiffres de participation. Ces résultats sonnent vraisemblablement l’urgence de marquer une véritable rupture en abandonnant le paradigme qui a fait, pendant des décennies, que des formations politiques inexistantes dans la société représentent celle-ci dans les Assemblées donnant lieu plutôt à une clientélisation qui a faussé le principe de la représentation avec ce coût politique qui est l’affaiblissement des institutions. De même que le recours à ce qui est appelé «la société civile», pour animer et accompagner des joutes politiques, a révélé une adéquation entre les objectifs et les moyens mis en place, recommandent des observateurs avertis.

De bons points pour l’ANIE
Par contre, le processus référendaire a permis à l’Autorité nationale indépendante des élections de gagner des points, notamment au vu du taux de participation communiqué qui sonne une rupture avec le bourrage des urnes et la trituration des suffrages exprimés. Même si son président, Mohamed Charfi, n’a pas réussi son oral dans la proclamation des résultats – un exercice assuré pendant longtemps par les ministres de l’Intérieur -, l’ANIE, dont c’était le second test après celui de la présidentielle du 12 décembre dernier, en sort grandie.
Sous son encadrement, le référendum populaire a gagné en crédibilité aussi bien dans son étape de campagne et de déroulement que dans sa phase de proclamation des résultats obtenus. A l’évidence, l’ANIE tend à s’imposer comme un acteur sur lequel il faudra compter dans les futures échéances électorales alors que l’encadrement qu’assurait l’administration avant la tenue de la dernière élection présidentielle, la première après le mouvement populaire, semble faire partie du passé, d’autant plus que le texte sur lequel s’est exprimé le peuple dimanche propose sa constitutionnalisation comme «gage de transparence» de tout scrutin. n